Quelques modestes pistes de reflexion sur l'effet de serre |
La lutte contre l'effet de serre est devenu un enjeu planétaire majeur exigeant la collaboration de tous. Les acteurs des filières électriques, pleinement conscients de leurs responsabilités mais aussi de leur importante marge de manoeuvre se mobilisent et peuvent, avec le nucléaire, le solaire, l'éolien et l'hydraulique, apporter une contribution décisive dans la conciliation de la poursuite du développement économique des pays avec la réduction des émissions de CO2 et la préservation de l'équilibre de l'écosystème.
La présence de certains gaz comme le dioxyde de carbone contribue à piéger les rayonnements infrarouges réfléchis par la terre et donc à réchauffer l'atmosphère. La teneur en dioxyde de carbone (CO2) de l'atmosphère croît régulièrement depuis le début de l'ère industrielle ; le taux de croissance actuel atteint 0,5 % par an, ce qui pourrait amener, au milieu du prochain siècle, à un doublement de la teneur atmosphérique en gaz carbonique et un réchauffement de la Planète. Ce phénomène est lié :
A l'usage croissant des combustibles fossiles : lors de la combustion, on libère dans l'atmosphère, sous forme de CO2, le carbone accumulé dans le charbon, le gaz et le pétrole)
Dans une moindre mesure, à la déforestation : on réduit la capacité de l'écosystème à fixer le CO2 dans les organismes végétaux (processus de la photosynthèse).
Le dioxyde de carbone n'est pas l'unique "gaz à effet de serre". On peut également incriminer la vapeur d'eau, premier gaz à effet de serre, mais dans les circonstances actuelles, son cycle planétaire ne paraît pas influencé par les activités humaines. Parmi les gaz à effet de serre affectés par les activités humaines, le CO2 joue le rôle prépondérant (environ 70 %), loin devant le méthane, les oxydes d'azote et les chlorofluorocarbures (également responsables de la dégradation de la couche d'ozone).
Les changements climatiques dus à l'effet de serre sont-ils une simple hypothèse ? Non, on assiste à une convergence des prévisions des experts internationaux sur la réalité et l'ampleur du phénomène et la menace qu'il engendre, au moins à moyen terme (les projections sur le long terme sont à la fois moins précises et encore plus inquiétantes). La gravité du problème a d'ailleurs entraîné la promulgation d'une convention internationale permanente : la Convention Cadre des Nations Unies sur les Changements Climatiques (CCNUCC) ; cette convention définit son champ de la façon suivante : "on entend par changements climatiques des changements de climat qui sont attribués directement ou indirectement à l'action humaine et qui viennent s'ajouter à la variabilité naturelle du climat observée au cours de périodes comparables".
L'impact de l'effet de serre n'est pas localisé. Contrairement par exemple aux pollutions urbaines qui restent partiellement localisées à proximité des zones d'émission, le problème de l'effet de serre est planétaire : le CO2 produit dans un continent a un impact sur tous les autres. La lutte contre l'effet de serre en appelle donc à la responsabilité de tous les pays, à la collaboration de tous les acteurs et à la solidarité entre les générations.
Toutes les études sur les changements climatiques sont coordonnées et centralisées par le Groupe d'Experts Intergouvernemental sur l'Evolution du Climat (GIEC), réuni sous l'égide des Nations-Unies. Lors de sa dernière publication ("Le Changement Climatique. Dimensions Economiques et Sociales"), le GIEC précise ses scénarios : "Si les tendances actuelles se poursuivent, les concentrations [de CO2] auront doublé avant la fin du siècle prochain par rapport aux niveaux de la période pré-industrielle, et, si rien n'est fait pour les maîtriser, elles continueront à augmenter par la suite. La communauté scientifique a noté les effets potentiels importants des augmentations de concentration [...]. Ces effets climatiques pourraient, à leur tour, produire d'autres effets sur la biosphère tels qu'une augmentation de la température mondiale moyenne, une élévation du niveau de la mer, des modifications des rendements agricoles, du couvert forestier et des ressources en eau, et une augmentation éventuelle des dégâts dus aux tempêtes".
Les experts ont précisé leurs scénarios et proposent les évolutions suivantes :
Entre 1990 et 2100, hausse supplémentaire de 1,0 à 3,5 °C de la température moyenne à la surface de la Planète. Elle s'ajoute à la hausse observée jusqu'en 1990 (0,3 à 0,6 °C)".
Elévation du niveau de la mer de 50 cm durant la même période : 80 % des zones marécageuses côtières pourraient être submergées, principalement dans les pays en voie de développement. Ainsi 11 % de la superficie du Bangladesh serait rayée de la carte
Modification de la répartition géographique des précipitations : "l'intensification des précipitations pourrait augmenter l'érosion du sol dans certaines régions, tandis que d'autres pourraient être touchées par la sécheresse [...] Dans de nombreux endroits situés à des latitudes moyennes, la fréquence de sécheresses terribles, qui ne se produisent actuellement que sur 5 % du temps, pourra atteindre 50 % à l'horizon des années 2050".
Modification du couvert forestier : "[on] estime à 40 % la perte des forêts aux Etats-Unis"
Augmentation de l'évapotranspiration et diminution des précipitations réduiront la disponibilité en eau : diminution d'environ 1/3 aux Etats-Unis selon les modèles de simulation.
Augmentation de la pollution atmosphérique par élévation des concentrations d'ozone (sous le simple effet de la température).
Augmentation de la pollution des eaux du fait d'une réduction du débit des fleuves et d'une diminution de la teneur en oxygène de l'eau (sous l'effet de son réchauffement) - déplacement de populations : "L'érosion du littoral, les crues des rivières et les inondations des côtes ainsi que de graves sécheresses, pourraient contraindre des millions de personnes à se déplacer.[...]en 2050, on comptera 150 millions de réfugiés supplémentaires".
Pour le plus long terme (100 à 500 ans) les experts prévoient des conséquences encore beaucoup plus sévères compte tenu des phénomènes cumulatifs et du décalage dans le temps entre cause et conséquences. La concentration en CO2 poursuivrait sa croissance jusqu'en 2200, c'est-à-dire jusqu'à épuisement des ressources d'énergie fossile : le taux de CO2 représenterait alors 6 à 8 fois le niveau pré-industriel provoquant un accroissement de température, pouvant atteindre selon les modèles, 6 °C à 18 °C. Les scénarios évoquent une fonte des glaces polaires, une élévation du niveau de la mer "de 2 à 3 m" etc...
Un long décalage entre l'inquiétude des scientifiques et la prudence des dirigeants. C'est en 1979 que les scientifiques ont tiré la sonnette d'alarme lors de la première conférence des Nations Unies sur le changement climatique ; ils mettaient en garde les hommes politiques contre "un potentiel changement climatique dû à l'activité humaine et susceptible d'obérer le bien-être de l'humanité". Mais il faudra attendre le "Sommet de Rio" pour que les pays industrialisés envisagent le principe d'une stabilisation de leurs émissions de gaz à effet de serre au niveau de 1990 à l'horizon 2000. Depuis lors, la prise de conscience s'est généralisée avec la multiplication des rapports scientifiques convergents.
Tous les acteurs admettent maintenant la nécessité d'efforts considérables pour assurer l'équilibre de la Planète : comment réduire les émissions de CO2 alors que la population mondiale poursuit sa progression et que tous les scénarios prévoient un accroissement rapide de la consommation d'énergie dû aux légitimes aspirations des peuples vers plus de confort et de bien-être ?
Le point d'inflexion de Kyoto : l'engagement responsable des pays A Kyoto en décembre 1997, le débat ne portait plus sur la réalité de l'effet de serre et sur la nécessité de prendre des mesures, mais sur les niveaux d'engagement des différentes parties. Kyoto constitue une étape décisive dans les négociations internationale sur l'effet de serre et sur l'équilibre de l'écosystème planétaire : les pays industrialisés et certains pays en transition se sont engagés à réduire en moyenne de 5,2 % les émissions de 6 gaz à effet de serre (d'ici 2008-2012 et en prenant comme référence l'année 1990). Lors de la conférence de Buenos-Aires en Novembre 1998, il s'est agi de proposer des mesures concrètes pour rendre crédibles et réalistes les engagements de Kyoto et de mettre en oeuvre de véritables programmes de réduction des émissions de C02.
Dans le monde, l'activité production d'électricité est responsable de 40 % de la production de CO2, mais avec des écarts considérables entre les pays (8 % dans le cas de la France et 51 % au Danemark). En Europe ce secteur reste le premier producteur de CO2 mais avec une stabilisation des émissions depuis 1984 (grâce surtout au nucléaire). La croissance des émissions du secteur des transports constituele phénomène le plus préoccupant au niveau mondial dans la mesure où il s'agit apparemment d'une tendance lourde sans point d'inflexion visible : + 33 % en 10 ans en Europe.
En revanche l'amélioration de l'efficacité énergétique dans les secteurs industriels et tertiaires a déjà permis des réductions notables d'émission dans les pays industrialisés : - 12 % dans l'industrie et - 20 % dans le tertiaire en Europe durant les 10 dernières années.
On observe des écarts considérables des émissions entre les différents pays, exprimés en tonnes de CO2 par habitant ou par unité de PIB (Produit Intérieur Brut) : 34 t par habitant et par an au Luxembourg, 20 t aux USA, 16 t en Australie et au Canada, 13 t en Allemagne, 10 t aux Pays-Bas en Grande-Bretagne et au Danemark, 7 t en France, 4 t au Portugal et au Mexique et enfin 3 t en Chine (tous ces chiffres correspondent à l'année de référence, 1990). Ces contrastes s'expliquent par les niveaux de développement industriel des différents pays mais aussi par les efforts respectifs d'efficacité énergétique de chacun d'eux : ainsi par unité de PIB, la France apparaît comme le "meilleur élève mondial" avec la Suède et la Suisse. Par ailleurs les évolutions tendancielles présentent également des profils très différents : stabilisation dans l'Union Européenne ; forte augmentation aux USA, Canada et Japon ; croissance spectaculaire et ininterrompue des grands pays en voie de développement.
Des gisements considérables de réduction des émissions de CO2 existent dans le domaine des transports : transfert du transport individuel vers le transport collectif grâce notamment à une offre accrue de transport ferroviaire à traction électrique (tramways, trains régionaux, trains interurbains à grande vitesse), développement des voitures électriques et hybrides, développement du transport combiné de fret etc. Citons le cas de la Chine qui consomme aujourd'hui 1,5 Milliards de tonnes de charbon, autant que tous les pays de l'OCDE réunis ; la moitié du charbon qui est extrait du Nord-Ouest de la Chine, est consommée pour transporter l'autre moitié sur les lieux de consommation dans le Sud-Est ! Une électrification du réseau permettrait des économies considérables de charbon et d'émission de CO2.
Mais il existe aussi des gains possibles dans l'industrie par le remplacement de techniques énergivores par des techniques électriques performantes (pompes à chaleur, recompression mécanique des vapeurs, induction etc.), et également dans le résidentiel et le tertiaire notamment par le développement du chauffage électrique etc.
Voici quelques chiffres qui montre les niveaux d'émission unitaires de CO2 pour la production d'électricité en fonction des énergies utilisées (Source ETSU) :
1kWh "nucléaire" = 4 g de CO2 1 kWh "gaz" = 446 g de "CO2" 1 kWh "pétrole" = 818 g de CO2 1 kWh "charbon" = 955 g de CO2
Le niveau d'émission d'1 kWh solaire dépend ... du lieu de fabrication du panneau photovoltaïque ; en effet la fabrication d'un panneau nécessite des quantités importantes d'électricité : en "amortissant" ces émissions liées à la fabrication, sur la durée de vie de l'équipement, on constate qu'un panneau fabriqué en France "émet" environ 50 g de CO2 par kWh produit alors qu'en Allemagne ce ratio s'élèverait à 200 g de CO2 par kWh produit...
Selon les caractéristiques du système de production électriques des différents pays, leurs niveaux d'émission de CO2 par kWh produit présentent donc des valeurs très contrastées (Source : DG XVII Mars 1997 , chiffres concernant l'année 1995) :
Valeurs très faibles pour les pays qui ont opté pour une combinaison majoritaire nucléaire/hydraulique : 78 g/kWh en France, 63 g/kWh en Suède.
Valeurs moyennes pour les pays à dominante combustibles fossiles/nucléaire : 669 g/kWh en Allemagne et 565 g/kWh en Grande-Bretagne
Valeurs élevées pour les pays à dominante charbonnière : 868 g/kWh au Danemark (pourtant surtout connu par son énergie éolienne, qui représente ...2 % de sa production d'électricité).
Ces écarts peuvent aussi s'interpréter en termes de gains potentiels : une généralisation du modèle français de production d'électricité à l'ensemble des pays de l'OCDE permettrait :
Une diminution de 87 % des émissions de CO2 liées à la production d'électricité dans l'OCDE
Une diminution de 32 % des émissions de CO2 tous secteurs confondus dans l'OCDE
Une diminution de 17 % des émissions de CO2, tous secteurs confondus à l'échelle de la Planète.
En Europe, le nucléaire, qui fournit près du tiers de l'électricité, permet déjà d'éviter le rejet de plus de 700 millions de tonnes de CO2 par an. Parmi les quatre scénarios énergétiques envisagés par la Commission Européenne dans un exercice prospectif, seul celui qui retient un accroissement significatif de la part du nucléaire permet une réduction des émissions de CO2 à l'horizon 2020 ("Scenario European Energy to 2020" European Commission DG XVII, Spring 1996). Le développement du nucléaire dans les pays industrialisés desserrera la contrainte énergétique au niveau mondial, facilitant l'accès aux combustibles fossiles pour les pays en voie de développement.
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walter
Création de l'article : 25 octobre 2003
Dernière mise à jour : 26 octobre 2003
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