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Une ex-filiale reproche à Monsanto le legs de procès coûteux |
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En décidant de se séparer, en 1997, de Solutia, une filiale chimique quasi-centenaire, le conseil d’administration de Monsanto avait-il senti le vent tourner ?
Toujours est-il que depuis le 17 décembre 2003, Solutia Inc. et 14 de ses filiales aux États-Unis se sont placées sous le régime des faillites commerciales (le chapitre 11 du code des faillites des États-Unis), gelant ainsi les procédures de remboursement qui découlent des procès de santé publique légués par l’ancienne maison mère.
De sa création en 1901 dans le Missouri jusqu’en 1997, Solutia fut une filiale chimique du groupe Monsanto. En 1997, ce dernier décida de se séparer de l’entreprise, lui léguant en héritage l’obligation d’assumer financièrement le coût des procès et les éventuelles indemnisations qui pourraient être obtenues au titre de dédommagement de santé ou de protection de l’environnement.
20 000 plaignants en Alabama
Justement, le 25 février 2002, le jury d’un tribunal de l’Alabama condamnait Solutia et Monsanto à verser 700 millions de dollars de dédommagement aux habitants d’Anniston, ville dans laquelle une usine de Solutia aurait rejeté, dans les réseaux d’eau publique, quantité de diphényles polychlorés (PBC, polychlorinated biphenyls), entre 1935 et 1971. Ces substances, selon les plus de 20 000 plaignants concernés, seraient à l’origine de problèmes dermatologiques, de stérilité, d’affection hépatique, de paralysie cérébrale ou encore de cancers. Selon les informations du Wall Street Journal, Solutia et Monsanto auraient accepté de payer à l’issue du jugement 610 millions de dollars (50 millions à la charge de Solutia, 390 millions à celle de Monsanto et 160 millions pour les assureurs des deux sociétés). Le journal ajoute que Solutia aurait dépensé plus de 50 millions de dollars pour le nettoyage d’une usine et des abords d’Anniston et 100 millions pour couvrir ces procédures judiciaires. En plus de ces sommes, le groupe Pfizer (repreneur de Pharmacia en avril 2003, ce groupe ayant lui-même acquis Monsanto en l’an 2000, puis lui ayant redonné indépendance deux ans plus tard), s’est engagé à dépenser 75 millions de dollars dans des programmes de santé et d’environnement, notamment un centre de recherche et une clinique qui seraient implantés à Anniston.
Solutia Inc. obtient un moratoire
En se mettant sous la protection du Chapitre 11 du code des faillites, le 17 décembre 2003, Solutia Inc. et ses 14 filiales relevant du droit commercial des États-Unis ont obtenu un sursis sur leurs engagements financiers, tout en pouvant poursuivre leurs activités commerciales.
Selon l’entreprise, le coût des litiges légués par Monsanto, et les règlements financiers afférents, lui coûtent chaque année 100 millions de dollars. Solutia aurait essayé de négocier avec son ancienne maison mère afin d’alléger le poids de ces engagements, mais sans succès, d’où la décision de se placer d’elle-même sous le Chapitre 11. Au 30 septembre 2003, Solutia estimait à environ 475 millions de dollars ses engagements pour le financement des assurances vie et santé de ses anciens employés mais aussi pour les pensions d’invalidité. L’entreprise est tenue de verser ces pensions sauf si une décision de justice revenait sur cet engagement. De plus, en 2002, Solutia avait déjà dépensé 26 millions de dollars au titre de l’assainissement environnemental (« environmental remediation activities »). Ce poste représenterait à l’avenir entre 30 et 40 millions de dollars par an. Même sous le coup du Chapitre 11, la loi des États-Unis prévoit que l’entreprise doit assumer cette responsabilité.
Laurent Campagnolle (Filigrane Press)
Novethic.fr
Mis en ligne le : 02/02/2004
Scientinelle
Création de l'article : 9 février 2004
Dernière mise à jour : 7 février 2004
Page visitée 971 fois (2)
P.S.
UN AUTRE MOTIF DE DISCORDE
Le 3 décembre 2003, Monsanto faisait état, dans un communiqué, du refus de Solutia de payer 3 millions de dollars, conséquence d’un autre procès, intenté celui-là au Texas par deux anciens employés de Solutia qui s’estiment victimes de l’amiante. Le document rappelle que ceci constituerait une première « brèche » depuis la scission entérinée en 1997, suite à laquelle Solutia n’a pas le droit « de déterminer, de façon sélective, quelles obligations [elle] doit honorer ». « Nous reconnaissons nos obligations d’indemnisation. Cependant, nous n’avons pas l’intention d’assumer quelque obligation qui ne relèverait pas de notre responsabilité durant ce processus [Ndlr, le placement sous chapitre 11 de Solutia] », déclarait Terry Crews, directeur financier de Monsanto, le 17 décembre 2003. « Nous prendrons au moment opportun les décisions qui vont dans l’intérêt supérieur de nos actionnaires, de nos employés, de nos clients et de nos détenteurs d’obligations, tout au long de ces démarches. »
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