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« La loi est dure, mais c’est la loi »
Tout changement social s’oppose à ce qui constitue l’expression du rapport social établi, la loi. S’il s’agit de faire simplement évoluer la loi pour améliorer les conditions présentes... on peut y parvenir. C’est une toute autre affaire que d’utiliser la loi pour radicalement changer le système dont elle est l’expression.
LA MYSTIQUE DE LA LOI
Tous les régimes, tous les systèmes, sans exception ont fait de la loi un véritable culte... en effet le respect de la loi garanti la stabilité du système qu’elle codifie, il est donc essentiel que le respect collectif à son égard soit absolu. Tous les régimes, tous les systèmes ont su trouver l’argumentation qui faisait de la loi quelque chose d’incontestable... que ce soit César, Dieu ou les Dieux, le Peuple, le fondement de la loi a eu toujours quelque chose de sacré... C’est le rôle de l’idéologie que de remplir cette fonction. Le décorum qui préside à la manifestation de la justice (à défaut souvent de la vérité) tient plus du subjectif que de l’objectif, du sacré que du profane... il s’agit d’impressionner par une mise en scène qui interdit toute tentative de remise en question, toute interrogation... Seule l’Eglise rivalise en spectacle avec la Justice.
Comme diraient certains le spectacle de la dérision n’a d’égal que la dérision du spectacle. Il faut d’ailleurs noter qu’aujourd’hui, du fait de la dégradation du lien social, le spectacle de la justice impressionne de moins en moins. (voir les incidents qui se multiplient dans les tribunaux)... en effet, sous le vernis de la respectabilité perce la réalité sociale qu’il recouvre : l’exclusion, les inégalités, la marginalisation. Le vernis judiciaire craque lorsque se délite le lien social qu’il est censé assurer. Ceci illustre les limites du discours officiel sur l’ordre. A défaut d’être respectable, faut-il encore que celui-ci soit supportable... et quand il ne l’est plus, tous les artifices du monde n’y peuvent plus rien. Le phénomène n’est pas nouveau, on le retrouve à toutes les étapes de l’évolution de l’humanité (voir l’article DECADENCE).
Le discours plus ou moins mystique, moralisant, se voulant civique sur la loi, devient aux yeux de plus en plus de monde un discours mystificateur lorsque la décomposition des rapports sociaux détruit le sens même du discours qui est censé les justifier. Par exemple quel sens peut prendre la notion de « droit de propriété des moyens de production » pour un licencié qui ne trouve plus d’emploi ? Quel sens peut avoir l’interdiction de voler pour celle ou celui qui n’a plus les moyens de vivre ? La situation est par ailleurs aggravée lorsque celles et ceux qui votent les lois, veillent à leur application, et donnent régulièrement des leçons de morale civique, les transgressent sans vergogne... par exemple, corruption, impunité, amnistie d’élus, de magistrats, de policiers,... et ce jusqu’aux plus hautes sphères du pouvoir. (voir le Canard Enchaîné). C’est par ailleurs ce qui explique que les défenseurs de la loi, politiques, police et magistrature, bénéficient, de fait (pas de droit, il faut sauver les apparences), d’une quasi impunité.
La « religion civique » fondée sur le respect de la loi, comme toutes les religions, à un moment donné de leur histoire, trouve sa limite dans la réalité du système qu’elle sert. Lorsque le système social qui la fonde ne peut plus assurer la dignité, voire la vie, des uns et des autres, alors le masque tombe et la norme est remise en question... le mythe a cessé d’exister... la contradiction entre les apparences entretenues sur l’ordre et l’équité et la réalité sociale éclate au grand jour.
DYNAMIQUE SOCIALE ET LEGALITE
Cette contradictoire entre le fait que la loi, qui a une légitimité populaire, puisse entrer en conflit avec la réalité des rapports sociaux fondés sur l’instrumentalisation de l’individu a un effet particulièrement dévastateur sur la cohésion sociale. La lutte sociale, pour l’égalité, pour les conditions de vie, pour la dignité, lorsqu’elle s’exacerbe, ce qui est le cas aujourd’hui, pousse la loi aux limites de son efficacité comme instrument de cohésion sociale, mais aussi comme norme sociale, respectable et respectée... a fortiori comme élément de coercition sociale.
La légalité n’a de sens que lorsqu’elle est socialement acceptable,... ce qui ne veut pas dire juste. Exemple : le contrat de travail est socialement respecté et accepté quoique fondamentalement inégalitaire. Or les limites de l’acceptable sont fonction du sens que trouvent les individus aux rapports sociaux qu’ils vivent. Par exemple, pour l’exclu-e, catégorie qui tend à progresser, l’inacceptable est atteint ou en passe de l’être. La révolte gronde. Il y a péril en la demeure. Le système marchand fondé sur un rapport de production, de plus en plus incapable de créer du lien social, et n’ayant plus grand-chose à négocier (voir l’article « Négocier ? ... Mais négocier quoi ? »), ne peut que s’en remettre, et oblige que tous s’en remettent, au respect de la loi... il ne lui reste plus que cela pour apparaître comme crédible, sinon dans les faits concrets, du moins dans les esprits... c’est à l’idéologie dominante (la pensée unique) à assurer cette fonction.
Un effort extraordinaire, de la part de l’Etat, du patronat, est en effet accompli pour éviter le terrain du social, de l’économique et ne s’en tenir qu’au superficiel et au symbolique : le respect de la norme.
Ainsi, la référence à la loi est en passe, aujourd’hui, de devenir un substitut à la lutte sociale. Le conflit de travail, et de manière générale le conflit social a tendance, est incité, encouragé à se régler « devant les tribunaux ». Le tribunal devient l’arbitre du conflit comme si la règle de droit, dont le tribunal est le défenseur et le garant, était considérée comme une référence absolue en matière d’équité. Il faut dire que les défenseurs et gestionnaires du système marchand, et leurs alliés, ont tout intérêt à ce que cette pratique se généralise, car, d’une part, d’une manière générale, elle désamorce le conflit, ou du moins oblige les salariés à une retenue au pouvoir démobilisateur, mais d’autre part la loi est généralement faite de telle manière, et le monde judiciaire est suffisamment conservateur, pour que les salariés aient les plus grandes « chances » d’être perdants.
Pour les salariés, l’expérience le prouve, la victoire est parfois possible sur le terrain judiciaire... mais ne rêvons pas, cette victoire, quoique importante sur l’instant, est tout à fait relative... elle ne règle jamais le problème sur le fond... Exemple : la condamnation par les tribunaux de patrons qui ont déménagé clandestinement les machines de leur usine, ou la condamnation d’employeurs pour licenciements. Généralement la condamnation est juridiquement prononcée... mais est sans suite dans les faits. Autre exemple : les chômeurs « recalculés » qui ont obtenu satisfaction devant les tribunaux... c’est positif, mais... ils sont toujours chômeurs.
Historiquement, dans une perspective de changement, la lutte sur le terrain judiciaire est perdue d’avance.
TRANSGRESSION DE LA LOI ET CHANGEMENT SOCIAL
Jamais, à aucun moment dans l’Histoire, le changement social, le vrai, c’est-à-dire le changement des rapports sociaux, pas celui que nous racontent les politiciens aujourd’hui pour nous faire patienter, ne s’est fait sans une contestation radicale de la loi ancienne et l’établissement de loi nouvelle. Encore que, il faille mettre en place de nouvelles relations sociales pour assurer, concrétiser le changement. En effet, changer une loi ou instaurer une loi nouvelle dans le cadre de rapports sociaux anciens n’a aucun sens. Exemple ? Exiger une loi interdisant les licenciements dans un système salarial ( ???). La loi nouvelle n’est en aucun cas une amélioration juridique des rapports sociaux existant, mais au contraire la reconnaissance collective de nouveaux rapports sociaux. Ceci ne veut pas dire qu’il ne faille pas à certains moments se battre pour améliorer la loi existante... mais sachons faire la différence entre cette démarche, purement conservatoire des rapports sociaux et celle qui consiste à en produire d’autres.
C’est plus la transgression du rapport social que la transgression de la loi qui fait, accompagne, détermine le changement. Rester dans le champ de la loi est le plus sûr moyen de, malgré une amélioration conjoncturelle de la situation présente, stériliser toute dynamique de changement... ne serait ce que parce que la loi est faite spécialement pour préserver un ordre social donné. Il est donc tout à fait logique que le discours dominant, officiel, privilégie et fasse respecter la loi existante qui n’est que l’expression juridique du rapport social dont il est le garant.
Mais transgresser la loi c’est passer dans l’illégalité, diront certains... et ils ont raison. Mais l’illégalité, comme la légalité, est tout à fait relative. La légalité, c’est-à-dire le champ de définition et d’application d’une loi est étroitement lié à la réalité sociale du pouvoir qui la garantie. Changez la réalité sociale, les rapports de production, définissez une nouvelle éthique entre les individus, et l’ancienne légalité devient caduque... en quelque sorte, l’ancienne loi passe dans l’illégalité. (voir l’article « Transition »).
La transgression de la loi, en tant qu’acte historique et social, n’est donc pas un simple acte individuel, pas plus qu’un mouvement spontané et éphémère... il est l’expression d’un dépassement d’un rapport social et l’expression de la mise en forme d’une nouvelle éthique. Ceci nécessite autre chose de plus consistant qu’une réaction épidermique, voire même d’une simple révolte. C’est à cette condition, et seulement à cette condition que l’on procède à un véritable changement social.
Patrick MIGNARD
Mai 2004
Patrick MIGNARD
Création de l'article : 11 mai 2004
Dernière mise à jour : 10 mai 2004
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> Dura lex, sed lex (2)
20 novembre 2004, par
La légitimité (2)
Rappelons que notre propos est la liberté et rien d’autre, autrement dit, de contribuer à ce que chacun puisse exercer librement sa volonté. Or, c’est précisément ce que ne permettent pas l’ignorance et l’erreur, car la volonté n’est vraiment libre que lorsqu’elle repose sur la Connaissance ou la Vérité si on veut, non pas lorsqu’elle suit les impulsions de l’ignorance et les sollicitations de l’erreur. Le combat pour la liberté est donc avant tout le combat pour la Connaissance. Et, parce que la connaissance est le bien de l’intelligence ou encore sa santé, l’accès à la liberté passe nécessairement par le perfectionnement de l’intelligence. Or, c’est précisément ce qu’on s’efforce de dissimuler au grand nombre pour le maintenir dans l’asservissement, avec la complicité de sa volonté ignorante. En prenant le problème du point de vue de la justice, nous dirons que la racine de toute injustice, c’est de revendiquer l’exercice d’une volonté ignorante et de s’y complaire. Ce qui permet cette revendication abusive, c’est la négation, si chère à nos contemporains, du concept de Vérité. On connaît le trop fameux : "à chacun sa vérité à chacun sa vertu". Négation très commode pour honorer la paresse intellectuelle et déguiser l’incapacité en ouverture d’esprit, berceau du subjectivisme qui ouvre sur toutes les décompositions intellectuelles et morales. En tenant ses propos nous savons bien que nous ne nous ferons pas que des amis, nous savons aussi que nous ne serons ni le premier ni le dernier à devoir assumer le phénomène de rejet qui caractérise toute intrusion d’un élément exogène inassimilable à priori par une ambiance qui n’y est pas préparée. C’est donc en parfaite connaissance de cause que nous exposons cette doctrine purificatrice pour ceux qui souhaitent se purifier. Revenons maintenant au concept de LOI. Encore une fois Monsieur Mignard à l’instar de ce qu’il fait pour la Religion met en évidence l’insuffisance de son approche fonctionnaliste de la réalité quand il traite de la loi. Son réductionnisme consiste à identifier purement et simplement une réalité avec la fonction qu’il croit la voir remplir, à tort ou à raison, dans le domaine horizontal et fragmentaire qui occupe son intérêt, en l’occurrence : le champ économico politique profane. Ce dernier adjectif n’étant pas anodin, puisqu’il existe bel et bien une économie traditionnelle sacrée qui a davantage d’affinité avec ce qu’il est convenu d’appeler écologie qu’avec l’économie moderne. En vérité, il y a : LOI, LOIS, lois, lois et... lois, selon une déclinaison ontologique continue jusqu’au quatrième degré et un saut, ou plus précisément, une chute du quatrième au cinquième niveau. Je suis désolé de devoir recourir à ces artifices graphiques pour évoquer les distinctions hiérarchiques qui s’attachent à ce concept dans mon entendement comme dans la réalité. Distinctions capitales en dehors desquelles tout ce qu’on pourrait énoncer en matière de légitimité ne pourrait avoir qu’un caractère puéril si ce n’est inepte. Inhérents à notre esprit sont les concepts d’absolu, de relatif et de hiérarchie. La première de toutes les LOIS, c’est de connaître l’Absolu comme transcendant toute manifestation et transcendant la Transcendance elle-même par la considération de son immanence dans le Phénomène, Réalité surintelligible, Mystère intellectuellement irréductible. La LOI à ce niveau est tout simplement ce qui relie la Toute Possibilité, à la possibilité de la Manifestation, ce n’est qu’au deuxième niveau qu’apparaît ce qu’on appelle DIEU dans les Religions et qui est la première réalité intelligible, source de toute intelligibilité. L’état de Divinité est donc le fondement de toute LOI susceptible d’énonciation. En réalité, l’énonciation ou l’expression, est une forme qui dérive des possibilités réceptives de celui qui reçoit l’énoncé ; La LOI devient alors Sa LOI, sans cesser pour autant d’être La LOI grâce à la conscience symbolique qui remonte le courant de l’Intelligence Manifestante, de la relativité de sa LOI à l’Absolu de La LOI. La possibilité du symbolisme, donne évidemment naissance à la pluralité dès lors qu’une même essence peut se manifester sous plusieurs formes et d’autant plus qu’intervient la diversité des réceptacles humains, selon leurs prédispositions pour telles ou telles formes avec lesquelles ils présentent des affinités existentielles. C’est ce principe qu’exprime la diversité des Révélations, leurs LOIS respectives sont des cristallisations particulières de la même substance intelligible qui est comme le corps de la Divinité. C’est à peu près le même phénomène qui se produit dans l’apparition de l’arc-en-ciel : une décomposition spectrale. La diversité des couleurs ne contredit pas l’unité de la lumière et ne porte aucun préjudice à l’esthétique, c’est le moins qu’on puisse dire. Les LOIS à ce niveau ne sont donc pas des conventions collectives, mais résultent effectivement des caractères spécifiques de telle collectivité concernée par la dite Révélation, en fonction d’une affinité ontologique, ce qui est tout autre chose qu’une convention. Sans participer de la Révélation elle-même qui n’a aucune raison d’empiéter sur ce que la logique est capable de trouver, il y a aussi un certain nombre de règles traditionnelles qui en dérivent logiquement et qui s’intègrent au corpus de lois traditionnelles. Certaines d’entre-elles prennent en considération une ambiance historiquement contingente et par conséquent héritent elles-mêmes de cette contingence, ce qui permet d’envisager leur caducité par le fait d’un changement de circonstances. Il faut remarquer que même ces règles ne peuvent pas être considérées comme de simples conventions collectives puisqu’elles sont des conséquences logiques solidaires des impératifs ontologiques livrés par la Révélation. Leur caducité peut, il est vrai, donner le change, et laisser croire à leur caractère conventionnel. Ce qui ajoute à la complexité du problème, c’est que la Tradition elle-même est à la merci de la corruption et de l’arbitraire humain en sorte que des innovations menacent constamment son intégrité. Dès lors, que la corruption ou la dégénérescence a fait son œuvre, il devient particulièrement difficile pour celui qui ne possède pas un discernement métaphysique suffisant, de faire la part des choses, et il a tôt fait de ranger toutes les lois dans le conventionnel et l’arbitraire. Cette erreur menace particulièrement ceux dont les références internes et externes se confondent avec la modernité, dans la mesure où précisément, presque toutes les lois modernes sont conventionnelles, et au mieux, dérivent logiquement de pseudo principes sans connexion consciente avec une quelconque dimension ontologique. On trouve même de plus en plus de...lois complètement arbitraires, dictées par les intérêts les plus illusoires et les plus vulgaires de quelques uns, mais qui sont présentées comme des nécessités scientifiques liées à l’économie. Il y a encore d’autres lois, présentées comme des victoires de la démocratie et de la liberté, qui croient "légitimer" quand elles ne font que légaliser, les penchants les plus ignorants du grand nombre. La légalité coïncide avec la légitimité si et seulement si la loi est légitime, ce qui exige qu’elle ait un fondement ontologique. L’ontologie n’a strictement rien à voir avec l’opinion du plus grand nombre, sauf si celui-ci possède encore une sensibilité normale et une intelligence intégrale ; conditions qui ne sont certainement pas réalisées dans le monde moderne. Au sens moderne, la démocratie est donc un leurre, doublement un leurre dans la mesure où premièrement : l’avis du plus grand nombre n’est pris en considération que s’il est compatible avec l’intérêt des puissants, et dans les domaines sur lesquels il lui est permis de se prononcer, deuxièmement : sur un sujet grave, l’avis du plus grand nombre peut accidentellement rejoindre la vérité, mais c’est un accident de plus en plus rare. L’acharnement avec lequel les gouvernements des grandes puissances de ce monde veulent instaurer la démocratie sur toute la terre devrait susciter quelques interrogations de la part de ceux qui n’ont pas encore perdu tout discernement. Pour tout dire, ces amas broussailleux de textes de lois vides de toute connexion avec la Réalité, desservent la Vérité et vouent au contraire un culte passionné au grand mensonge collectif qu’est la civilisation moderne, constituant une usurpation caractérisée de l’Autorité Traditionnelle régie par une LOI d’inspiration divine. Il n’y a sans doute guère de méthode plus efficace pour asseoir une domination de nos jours, que d’inculquer à la foule, l’idée saugrenue que la vérité suit le nombre, alors qu’en réalité elle n’est perçue que par une minorité qui aura miraculeusement su conserver une sensibilité normale et normative, et ceci, d’autant plus qu’il s’agit d’une vérité profonde et déterminante. Le pouvoir croissant des médias et la vanité du grand nombre, assurent à ceux qui les manipulent, le moyen de substituer dans la direction des sociétés, la suggestion collective au mérite et à l’autorité de l’exercice véritable du discernement. Les charlatans et les corrupteurs acharnés de tous genres, sont toujours là, pour conditionner et abreuver de leurs slogans mensongers, les foules incultes et impies, dressées à réclamer la caricature grossière et infecte de la justice dont on gave leur vanité, et à haïr toute aristocratie, celle de la pensée plus qu’une autre. Certes il faut aimer la justice, mais celle-ci ne commence qu’avec le respect de la véritable Hiérarchie et non son mépris. Si l’aveugle mérite notre respect, ce n’est assurément pas en tant qu’il conteste sa cécité, et revendique à corps et à cris, contre le bon sens et l’intérêt de tous, son droit de gérer au même titre que tous, ce qui ne saurait être sainement gérer, sans l’usage de la vue. On apprend certes aujourd’hui aux gens à raisonner, et dans certains milieux, ils raisonnent certainement mieux que leurs aînés, et grâce à l’expérience, sur bien des points, les modernes possèdent un sens critique dont la moyenne des anciens ne disposaient sans doute pas, du fait de l’absence des circonstances nécessaires au développement de ce sens critique, mais en contre partie, ils ne savent plus contempler ni évaluer ce sur quoi ils raisonnent, leur sensibilité s’écarte toujours plus de la normalité, au péril, et du sens, et de la saveur de l’Existence. Dans le même ordre d’idée, les techniques de communication se substituent à la qualité des échanges, car on communique énormément mais qu’est-on capable de communiquer ?
Dans le cadre de la communication précisément, la manipulation du langage et la manipulation par le langage, sont des artifices particulièrement prisés du Pouvoir. D’une part le pouvoir dominant est présenté comme L’Autorité, d’autre part, toute autorité susceptible de contrarier ce pouvoir est présentée comme un pouvoir dont il faut se méfier, un petit chef redoutable, un dictateur. La dictature est présentée comme une monstruosité, sans jamais qu’intervienne la question de son contenu, comme si Jésus n’était pas un dictateur comme chacun des prophètes. Il faudrait apparemment, conformément au bon sens moderne, que nous redoutions comme la peste ces saints hommes de Dieu et que nous leur préférions le gouvernement démocratique de nos crapules contemporaines. Les mercenaires chargés de la coercition au service de ces crapules, sont dénommés : forces de l’ordre, on confond volontairement ordre et organisation, le terrorisme d’État est baptisé intervention militaire préventive, toute contestation du public est une atteinte à l’ordre public. La loi étant sans cesse remaniée pour servir au plus près les intérêts que vous savez, ce remaniement constitue un véritable Pouvoir législatif, usurpant comme nous l’avons déjà dit l’Autorité de la vraie LOI stable par définition, soutenu bien sûr par un Pouvoir judiciaire à la solde du premier et mille autres stratagèmes terminologiques ayant vocation à égarer la sémantique.
à suivre... à la suite de l’article : Le travail en question(1)
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> Dura lex, sed lex (2)
2 juin 2004, par
Otez moi d’un doute... Lorsqu’une démocratie fait passer l’application de la loi d’un moyen de cohésion sociale à un moyen de coercition pour masquer ses insuffisances, cela ne finit-il pas par s’appeler une dictature ???
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