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Lettre ouverte aux partenaires sociaux en charge de la négociation sur le régime d’assurance chômage des intermittents du spectacle
Depuis quelques jours, de nouveau, comme un mauvais rêve opiniâtre dont on n’arrive pas à se défaire, revient sur le devant de la scène la négociation sur le régime d’assurance chômage des professionnels du spectacle : ceux que l’on appelle couramment les intermittents. Des années que cela dure, des années qu’aucune solution durable n’a été trouvée.
L’accord qui semble exister aujourd’hui entre tous les négociateurs pour maintenir un régime spécifique des techniciens et artistes du spectacle et de l’audiovisuel est une étape importante, nous souhaitons qu’elle s’accompagne le 26 juin 2003 (date prévue pour la prochaine séance de négociation entre les syndicats d’employeurs et de salariés) d’avancées significatives.
Nous sommes nombreux - artistes, techniciens, professionnels du spectacle, inquiets de la situation et désireux d’assumer nos responsabilités - à exprimer aujourd’hui notre lassitude et à demander aux négociateurs de prendre en compte les points suivants :
si nous sommes tous conscients des dysfonctionnements de l’annexe 8 et 10, et du déficit de l’ensemble du régime d’assurance chômage qui atteint 3,7 milliards d’€ en 2002, les mesures prises dans le cadre des négociations actuelles ne doivent pas conduire à un changement brutal des conditions d’affiliation et d’indemnisation ; à ce titre, les dernières propositions visant à acquérir 6 mois d’ouverture de droits, si 507 heures ont été travaillées dans les 9 mois qui précèdent, sont insuffisantes (actuellement 507 heures en 12 mois ouvrent 12 mois de droits) ;
nous approuvons toutes les mesures qui iraient dans le sens d’un meilleur contrôle des déclarations et souhaitons que tous les acteurs culturels se sentent responsables de l’avenir de ce régime ; nous pensons qu’il faut préciser les conditions d’embauche de salariés relevant de ce régime qui ont tendance à s’étendre dans des secteurs qui ne relèvent pas directement du spectacle ou de l’audiovisuel ;
nous sommes favorables à toutes les mesures (plancher de l’indemnité et plafond calculé sur un cumul indemnisation et salaire perçu, mode de calcul de l’indemnité ne défavorisant pas les personnels mensualisés...) visant à rendre plus juste ce régime spécifique pour qu’il garde sa fonction première : celle d’assurer un revenu décent entre les périodes de travail. Nous approuvons également toutes décisions qui viseraient à empêcher tous les abus éventuels de la part des employeurs ;
le 1er septembre 2002, les taux de cotisations employeurs et salariales pour les salariés relevant de l’annexe 8 et 10 ont doublé. Cette mesure annoncée brutalement a pris de cours de nombreuses structures, comme les salariés eux-mêmes, qui ont vu leur salaire net diminuer. Quels résultats ont donné ces mesures ? Quelles améliorations sur l’équilibre du régime ? Rappelons que le taux de cotisation (part employeur et salarié) est aujourd’hui de 10,8 % dans le cadre de l’annexe 8 et 10 contre 6,4 % pour le régime général. Notre régime prévoit, certes, quelques différences par rapport au régime général qui découlent des spécificités de nos métiers, mais employeurs et salariés du secteur payent aujourd’hui plus cher pour cela ;
n’est-il pas possible de sortir du débat habituel et d’ouvrir de nouvelles pistes de réflexion pour assurer le financement du régime ? Ne peut-on imaginer d’autres bases que la masse salariale pour servir d’assiette aux cotisations ?
face aux imprécisions ou contradictions relatives aux chiffres communiqués par les différents organismes sociaux sur la situation réelle de ce secteur, peut-on espérer que les évolutions du régime s’accompagnent d’une mise en place négociée d’indicateurs clairs qui permettent d’avoir une opinion éclairée sur le sujet ?
Si nous sommes responsables, c’est à dire impliqués dans l’avenir des annexes, il nous semble aussi nécessaire de souligner le caractère pervers des idées reçues sur le déficit des annexes qui est aujourd’hui le seul critère d’évaluation à défaut d’analyse statistique :
le raisonnement qui vise à proportionner les prestations offertes en fonction des cotisations versées pour un secteur déterminé d’activité est dangereux : imagine-t-on pour une branche d’activité en crise et procédant à de nombreux licenciements une diminution des prestations offertes dans ce cas, du fait du déséquilibre croissant qui ne manquerait pas d’apparaître entre des cotisations qui diminueraient et des prestations qui augmenteraient ?
l’exclusion quasi-mécanique du système d’assurance chômage de la partie la plus vulnérable des artistes et techniciens relevant légitimement des métiers du spectacle déplacerait le problème économique vers d’autres systèmes de prise en charge tout en rendant plus difficile leur insertion sociale du fait de la précarité de leur situation ;
les périodes non travaillées ne sont pas un choix mais les conséquences d’une situation économique difficile dans le secteur du spectacle ;
le secteur du spectacle et de l’audiovisuel est aussi créateur de richesses économiques et intellectuelles, générateur d’emplois permanents pour lesquels des cotisations sont versées au régime général, générateur d’activités induites et donc d’emploi.
Nous souhaitons que le 26 juin 2003 soit une journée de négociation forte et constructive qui nous permette d’envisager avec sérénité l’avenir et de nous consacrer à notre mission première : présenter au public des spectacles de qualité.
J’approuve les termes de la lettre ouverte aux partenaires sociaux en charge de la négociation sur le régime d’assurance chômage des intermittents du spectacle.
Nom Prénom Profession/Structure Signature
louison
Création de l'article : 20 juin 2003
Dernière mise à jour : 31 août 2003
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Intermittence urgent
17 janvier 2006
Au secours ! Nous sommes le 17 janvier 2006 et les intermittents du spectacle dont je fais(ais) partie sont en train de mourir... en silence. Y a-t-y kèkun chez vous ou ailleurs qui s’intéresse vraiment au problème ? La situation actuelle est pire qu’ inquiétante, les "troubadours des temps modernes" que nous sommes, et que vous êtes, dans ce souci permanent d’un monde plus solidaire sont condamnés à disparaître, comme les dinosaures. La preuve, votre site date de 2003. Ne baissez pas les bras... la véritable révolution culturelle est en marche et nous en sommes les acteurs incontournables. 2006 est l’année de tous les dangers donc de tous les rêves, de toutes les aventures et de tous les engagements. Je vous attends donc. Musicamicalement. ln.lea
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Intermittence urgent
23 janvier 2007, par
Je viens de tomber sur l’article, et sur ton message Lea. Pour ma part, je fais de la musique depuis l’âge de 10 ans (j’en ai 36)et depuis que je fais de la scène en amateur, on me pousse sans cesse à passer professionnel ! Et plus je fais de rencontres dans ce milieu plus la pression devient grande. Je travaille dans un domaine qui n’est pas du tout artistique, et je me sens en complet décalage avec ce que je vis au jour le jour. Les besoins matériels de ma petite famille m’obligent à garder un certain niveau de salaire (niveau agent de maîtrise), que je ne retrouve pas dans le milieu de la musique. J’ai plusieurs fois tenter de trouver une solution avec le statut de l’intermittence, mais trop de problèmes viennent se greffer lorsque l’on veut respecter les règles imposées à ce statut. Alors quoi faire, rester dans un système qui n’est pas le reflet de ce que l’on vit intérieurement, où foncer avec le grand risque de faire naufrage en entraînant ses proches qui croyaient en vous ? Ce qui me choque le plus dans la situation des intermittents, ce n’est pas principalement les lois qui ont modifiées le statut des artistes, mais plutôt la non-reconnaissance de notre travail ! Beaucoup de personnes voudraient nous voir sur scène et créer pour leur grand plaisir (le notre aussi), mais ces mêmes personnes font grise mine lorsque l’on annonce le montant du cachet brut global de notre prestation (sans bien sûr aller dans l’excès). Je pense que le changement de mentalité à ce sujet apporterait beaucoup de solutions au problème de l’intermittence. Une campagne de sensibiliation serait peut-être bien venue ??? Si d’autres artistes veulent réagir, n’hésitez pas, je crois que le débat est important !! Will M.
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> intermittence urgent
1er juillet 2003, par
Cet article a le mérite d’être informatif mais il est obsolète depuis la signature de l’accord entre le MEDEF et les syndicats minoritaires (CFDT,CFTC,CGC). Je fais partie du collectif limousin qui mène des actions quotidiennes depuis le 11 juin . Des actions de sensibilisation (défilés "mis en scène" sur le thême du cortège funèbre, distribution de tracts, interventions pour informer le public avant les représentations à limoges etc...) mais aussi des actions plus musclées (siège du MEDEF pendant trois jours, "murage" symbolique de la direction du travail, siège de la DRAC 1jour, occupation du grand théâtre de limoges) pour exiger que les négociations paritaires s’appuient sur le rapport FESAC (rapport commandité par le MEDEF et signé en 2001 par l’ensemble des syndicats interprofessionnels y compris la CGT et FO). La signature de "l’accord" du 27 juin ainsi que les propos du ministre de tutelle indiquant qu’il allait entériner le texte (30 juin) prouve que nous n’avons pas été entendus. Aujourd’hui le mouvement s’étend partout en france et de nombreux festivals sont menacés.L’un des plus prestigieux (Avignon) est sur la sellette et donne lieu à une médiatisation sans précédent. Beaucoup de ceux qui ont nourri ce mouvement en limousin (et ailleurs) se déplacent en avignon avec leur compagnie pour séduire les programmateurs. La grève générale, qu’ils défendent pour la plupart équivaut à un suicide car c’est l’ensemble de leur année artistique qui se joue là (beaucoup d’entrent eux construisent leur saison à partir d’avignon) Il faut beaucoup de courage pour se saborder à la cause coorporatiste car quelque soit l’issue du conflit un grand nombre ne survivra pas à la grève.
Un collectif d’intermittent s’est crée dans la cité des papes. Il a impérativement besoin du soutien de tous (ONG, collectivités, professions menacés, individus) pour que ce combat, qui dépasse trés largement le statut des intermittents, trouve un écho auprés de l’opinion publique et fasse fléchir (à défaut de faire réfléchir) nos dirigeants. Le mèl est : interluttantsavignon_98G_yahoo.fr
Dans quel monde voulons nous vivre ?
Philibère
intermittents en danger
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> intermittence urgent
2 juillet 2003, par
Salut,
je te remerci d’avoir pris le temps de mettre à jour l’info.Cela prouve que ce site est aussi consulté par des intermittents ! Je partage ton analyse,étant de la région,je ne manquerai pas de participer à la lutte.Pour ma part,j’ai participé au mouvement contre la décentralisation et la réforme des retraites.Lundi 23 juin,nous avons manifesté et occupé le tribunal de Nîmes pour demander la liberation de José. Je suis pour la convergence des luttes. Dans quel monde voulons nous vivre ?
Louison
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> intermittence urgent
4 juillet 2003, par
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> intermittence urgent
6 juillet 2003, par
J’AI RECU CE MESSAGE CE MATIN LE DEBAT EST OUVERT.
Message transféré De : Mick Miel > Date : Mon, 30 Jun 2003 17:27:13 +0200
Objet : Re : intermittents
Je fais suivre un texte sur le même sujet venant de la liste Multitudes. Il me semble qu’il a le mérite de poser quelques questions de fond. mick
pap-info
Texte des Précaires Associes de Paris pour le prochain numéro de la revue Cassandre
L’intermittence, entre production et création
Fabriquer du sensible, ce n’est pas poser la question " quel type d’art voulons nous faire ? mais dans quel(s) monde(s) voulons nous vivre ? Andreas Inglese
Les Précaires associés de Paris sont composés d’intermittents du spectacle (indemnisés ou non) et d’autres travailleurs précaires de la culture, de la formation et du monde associatif, pour la plupart non syndiqués. Durant ces derniers mois, nous nous sommes efforcés de créer des liens entre les divers secteurs en mouvement face à l’abaissement général des garanties du droit à l’existence. Nous avons aussi essayé de nourrir une réflexion pour la conquête de droits nouveaux partant de la flexibilité du travail, plutôt que de rester arrimés sur des "acquis" sans cesse grignotés, l’illusion du plein emploi ou de l’exception culturelle.
Cette position, nous la construisons à partir de deux points d’appui : notre position subjective face au travail et à la création, et l’évolution réelle du capitalisme contemporain. Nous revendiquons la précarité, elle fait partie intégrante de la vie et de l’exercice des pratiques artistiques. Nous subissons aussi la précarité : les temps de réflexion, d’écriture, d’apprentissages, de recherches nécessaires à toute perspective de création ne sont jamais rémunérés par les employeurs et c’est pourtant là que l’essentiel se constitue. Ils sont l’architecture secrète et vitale de tout acte créatif. Dans un monde assujetti à la marchandise, où le lien social ne se pense pas en dehors de la centralité du travail, nous proposons de repenser l’acte créatif comme une expérience partageable, comme coeur vif dans monde malade. Cette précarité que nous considérons comme nécessaire nous lie fraternellement à tous les autres précaires.
En effet, le statut des intermittents introduit une dissociation entre le revenu et le travail effectué directement pour un employeur. Car si elle est nécessaire à l’acte créatif, la flexibilité du temps de travail le devient aussi aux nouveaux modes de production capitalistiques. Comment renverser au profit du plus grand nombre cette situation qui produit souffrance et désespoir ? L¹alternative à la précarité ne peut plus être recherchée dans l¹illusoire perspective d¹une transformation de l¹ensemble des précaires en employés permanents. Pour abolir le chômage, il faudrait rechercher comment garantir un revenu permanent, en exigeant la rémunération de la flexibilité même. La recomposition de droits sociaux implique la reconnaissance pleine et entière du caractère productif de cette nouvelle forme du travail : l¹intermittence.
Bien entendu, c’est à contre-courant de ces tendances que rament les "réformes" tant des retraites que des allocations Unedic (spectacle et autres) ou des minima sociaux, qui veulent nier la part de liberté que comporte la flexibilité, en faire un outil de pur asservissement. Mais l’opposition à cette "réforme" restera faible, tant qu’elle ne remettra pas en cause un système assis sur la seule cotisation sociale, en constante régression, qui nous fait toujours plus nombreux les indésirables, vilains fauteurs de déficit : il faut chercher d’autres sources de financement à la protection de l’existence, et ceci implique aussi la révision du système "paritaire" de gestion, qui bloque toute réelle résistance aujourd’hui. Elle restera faible tant que les modèles dominants de la productivité ne seront pas entièrement remis à plat : qui mieux que nous pourrait y contribuer, nous, producteurs de valeurs immatérielles, fabricateurs du sensible ?
LES INTERMITTENTS CONTRE L’AGCS !
http://pap.ouvaton.org -
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