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Texte des Précaires Associés de Paris |
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Texte des Précaires Associés de Paris pour le prochain numéro de la revue Cassandre
L’intermittence, entre production et création
Fabriquer du sensible, ce n’est pas poser la question " quel type d’art voulons nous faire ? mais dans quel(s) monde(s) voulons nous vivre ? Andreas Inglese
Les Précaires associés de Paris sont composés d’intermittents du spectacle (indemnisés ou non) et d’autres travailleurs précaires de la culture, de la formation et du monde associatif, pour la plupart non syndiqués. Durant ces derniers mois, nous nous sommes efforcés de créer des liens entre les divers secteurs en mouvement face à l’abaissement général des garanties du droit à l’existence. Nous avons aussi essayé de nourrir une réflexion pour la conquête de droits nouveaux partant de la flexibilité du travail, plutôt que de rester arrimés sur des "acquis" sans cesse grignotés, l’illusion du plein emploi ou de l’exception culturelle.
Cette position, nous la construisons à partir de deux points d’appui : notre position subjective face au travail et à la création, et l’évolution réelle du capitalisme contemporain. Nous revendiquons la précarité, elle fait partie intégrante de la vie et de l’exercice des pratiques artistiques. Nous subissons aussi la précarité : les temps de réflexion, d’écriture, d’apprentissages, de recherches nécessaires à toute perspective de création ne sont jamais rémunérés par les employeurs et c’est pourtant là que l’essentiel se constitue. Ils sont l’architecture secrète et vitale de tout acte créatif. Dans un monde assujetti à la marchandise, où le lien social ne se pense pas en dehors de la centralité du travail, nous proposons de repenser l’acte créatif comme une expérience partageable, comme coeur vif dans monde malade. Cette précarité que nous considérons comme nécessaire nous lie fraternellement à tous les autres précaires.
En effet, le statut des intermittents introduit une dissociation entre le revenu et le travail effectué directement pour un employeur. Car si elle est nécessaire à l’acte créatif, la flexibilité du temps de travail le devient aussi aux nouveaux modes de production capitalistiques. Comment renverser au profit du plus grand nombre cette situation qui produit souffrance et désespoir ? L’alternative à la précarité ne peut plus être recherchée dans l’illusoire perspective d’une transformation de l’ensemble des précaires en employés permanents. Pour abolir le chômage, il faudrait rechercher comment garantir un revenu permanent, en exigeant la rémunération de la flexibilité même. La recomposition de droits sociaux implique la reconnaissance pleine et entière du caractère productif de cette nouvelle forme du travail : l’intermittence.
Bien entendu, c’est à contre-courant de ces tendances que rament les "réformes" tant des retraites que des allocations Unedic (spectacle et autres) ou des minima sociaux, qui veulent nier la part de liberté que comporte la flexibilité, en faire un outil de pur asservissement. Mais l’opposition à cette "réforme" restera faible, tant qu’elle ne remettra pas en cause un système assis sur la seule cotisation sociale, en constante régression, qui nous fait toujours plus nombreux les indésirables, vilains fauteurs de déficit : il faut chercher d’autres sources de financement à la protection de l’existence, et ceci implique aussi la révision du système "paritaire" de gestion, qui bloque toute réelle résistance aujourd’hui. Elle restera faible tant que les modèles dominants de la productivité ne seront pas entièrement remis à plat : qui mieux que nous pourrait y contribuer, nous, producteurs de valeurs immatérielles, fabricateurs du sensible ?
http://pap.ouvaton.org -
Voir aussi : Intermittence urgent
louison
Création de l'article : 31 août 2003
Dernière mise à jour : 31 août 2003
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