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La France et les usines d’enrichissement de l’uranium : D’Eurodif (Georges Besse I) à Georges Besse II

lundi 7 novembre 2005

La France va abandonner le procédé d’enrichissement par diffusion gazeuse actuellement utilisé à l’usine Eurodif pour un procédé par centrifugation. Ceci nécessite la création d’une nouvelle installation nucléaire de base et devrait susciter une mobilisation antinucléaire nationale car l’enrichissement de l’uranium est à la base de toute l’industrie nucléaire civile et aussi militaire.

Rappelons que des trois isotopes U238, U235, U234 de l’uranium naturel, seul l’uranium 235 est fissile. Alors que sa concentration en poids est d’environ 0,71% dans l’uranium naturel (pour 99,28% d’U238 et 0,005% U234) il est nécessaire d’augmenter la concentration en U235 pour utiliser l’uranium dans les réacteurs nucléaires. Elle est enrichie entre 3 et 6% dans le combustible des réacteurs actuels. Il est envisagé un enrichissement à 15% pour les réacteurs dits de 4ème génération.
L’étape de l’enrichissement intervient après l’extraction du minerai d’uranium puis de sa concentration en uranium sur le site minier par des traitements aboutissant à un produit pâteux (le « yellow cake ») et de la conversion des concentrés d’uranium en hexafluorure d’uranium UF6 à Pierrelatte (Drôme) dans les installations de COMURHEX. L’enrichissement s’effectue sur l’UF6 gazeux à l’usine Eurodif de Pierrelatte, rebaptisée Georges Besse I, par le procédé de diffusion gazeuse.
Remarquons que s’il y a enrichissement de l’uranium d’une part, il reste bien évidemment de l’uranium appauvri d’autre part : la conversion de 8 kg d’uranium naturel à 0,71% d’U235, produit 1 kg d’uranium enrichi à 3,7% et 7 kg d’uranium appauvri (UA) à 0,25%.
Le projet annoncé par AREVA de passer de la diffusion gazeuse à un autre procédé par centrifugation, a fait l’objet d’un débat public en Rhône-Alpes du 1er septembre au 22 octobre 2004. A notre connaissance, la seule réaction sur place a été une conférence de presse menée par la CRIIRAD et le Réseau « Sortir du nucléaire ».
Or, en Limousin nous sommes aussi concernés, qui dit enrichissement de l’uranium dit aussi qu’il en résulte de l’uranium appauvri (UA) nous le savons et pour cause, puisqu’à Bessines nous avons hérité de l’UA résultant de l’enrichissement effectué à Eurodif. Dans une ICPE, installation classée pour la protection de l’environnement, a été autorisé « l’entreposage » de 199 900 tonnes d’oxyde d’uranium appauvri sous forme de poudre ! Cette ICPE personne n’en voulait en 1995, ni la population ni les élus ni les commissaires enquêteurs malgré l’argument développé par COGEMA d’un ré-enrichissement ultérieur de UA grâce à une merveilleuse technique par laser, le procédé SILVA. Aussi, dès que nous avons appris l’existence du nouveau projet AREVA nous avons saisi par courrier les élus des Conseils Régional et Général, et par tract distribué à Limoges la population, tous s’étant autrefois massivement prononcés contre le projet d’entreposage de UA.

Nous nous sommes procurés la pub AREVA sur le sujet en téléphonant à COGEMA-Pierrelatte, une somptueuse plaquette, ainsi que le « Dossier du maître d’ouvrage » ces deux documents étant destinés au débat public.
Ce que nous avons appris, entre autres, sur l’enrichissement par laser qui nous fut présenté en 1995 comme une solution d’avenir pour la matière première que serait l’uranium appauvri a, comme on dit, « retenu toute notre attention ». Lors du dépôt du dossier d’enquête publique, le laser était « la » solution retenue qui permettrait de reprendre les 199 900 tonnes d’UA pour les ré-enrichir, tout cela afin de convaincre les élus et la population qu’il s’agissait bien d’un entreposage et non d’un stockage, que cet UA serait enlevé pour être enrichi au bout d’une vingtaine d’années voire moins, voulant prouver par là que cet UA n’est pas un déchet. Or voilà la chose abandonnée, bien qu’elle ait « fait la preuve de sa capacité théorique à enrichir l’uranium, son utilisation industrielle se heurtant à des coûts rédhibitoires... » ? Comme quoi les prévisions à court terme dans le nucléaire sont aussi fiables que la météo du lundi pour le week-end...

La surprise de la centrifugation (procédé adopté pour Georges Besse II) c’est l’économie d’énergie qui est annoncée pour une capacité annuelle nominale voisine de celle de la diffusion gazeuse. La capacité de production est évaluée en unités dites UTS, « unité de travail de séparation ** en 2001 Eurodif a produit 2 165 tonnes d’UF6 enrichi à partir de 18 194 tonnes d’UF6 naturel fourni par Comurhex-Pierrelatte. D’après la documentation AREVA la production de 1 kg d’uranium enrichi à partir de 8 kg d’uranium naturel correspond à 5 UTS et un réacteur de 900 MW consomme annuellement 100 000 UTS.)

Eurodif utilise 3 réacteurs du Tricastin à pleine puissance et on peut faire pareil avec seulement 50 MW ! On voit que le gaspillage n’est pas l’exclusivité des ménages ! Pourquoi avoir choisi la diffusion gazeuse alors que le procédé par centrifugation est aussi ancien ?

Le calendrier prévisionnel semble avoir quelque retard. Début 2005 devait voir l’attribution du « Permis de construire » et le début des enquêtes publiques DAC (décret d’autorisation de création de l’installation nucléaire de base INB) et DARPE (demande d’arrêté de rejet et de prélèvement d’eau). La DRIRE nous a confirmé en juin 2005 que les dossiers d’enquête publique n’étaient toujours pas arrivés dans ses services.
Ce retard est-il dû au fait que des études de sûreté concernant le risque de sismicité, le risque de criticité et le risque de chute d’avion ont été demandées par l’autorité de sûreté nucléaire (ASN) ? Ces études sont-elles terminées et ont-elles donné satisfaction à l’ASN ?

Quelques comparaisons entre Georges Besse I (Eurodif) et le futur Georges Besse II
  Eurodif-Georges Besse I
Diffusion gazeuse
Georges Besse II
Centrifugation
Puissance électrique utilisée
Eau prélevée

Energie fossile

2 600 Mégawatts
70 000 m3 par an (nappe)
26 000 m3 par an (surface)
88 t/an fuel léger, essence
21 000 MWh (gaz naturel)
50 Mégawatts
40 000 m3 par an (nappe)

88 t/an fuel léger, essence

Le débat public : qu’en dire, sinon que la Commission Nationale de Débat public ayant décidé que l’organisation du débat public serait confiée au maître d’ouvrage, AREVA ( ! ) on peut lire qu’une « commission de pilotage composée de quatre membres indépendants du groupe AREVA, est chargée d’animer le débat public ». Pas d’autres indices nous permettant de mieux cerner « l’indépendance » de ces quatre membres... Mais il y a bien longtemps que nous avons appris qu’en matière de nucléaire, tout n’est qu’une affaire de croyance, qu’il s’agisse de transparence, d’information objective, d’infaillibilité des concepteurs ou de celle des exploitants, des enseignements du « retour d’expérience » après incidents ou accidents.
Pour en savoir plus : http://www.debatpublic-gbesse2.org

Au fond notre critique porte sur ce qui ne figure pas au projet de débat public et qui devrait impérativement en faire partie, à savoir :
- que deviennent les déchets de l’enrichissement, où sont-ils censés aller ? Les réunions publiques ayant été organisées dans les communes situées aux alentours du site nucléaire du Tricastin, le débat contradictoire n’a pas été accessible aux habitants du Limousin. Cette carence du dossier sera passée inaperçue alors que 7 kg d’UA sont produits par kg d’uranium enrichi !
- Où entreposer l’uranium appauvri ? Sur place ? Sur quelque site minier propriété de COGEMA ?
- Où iront les tonneaux de fluorine provenant de la défluoration de l’U appauvri et qui contiennent de l’uranium ? Sur quelle décharge publique ? (A notre connaissance la réaction de l’association ASPCV * Selon AREVA, l’UTS (Unité de Travail de Séparation) est l’unité de mesure utilisée comme standard international pour quantifier les besoins en enrichissement des réacteurs et la capacité des usines d’enrichissement, quelle que soit la technologie utilisée.
http://www.wise-paris.org/francais/nosbreves/annee_2002/nosbreves021018c.html

La lettre d’information du Comité Stop Nogent-sur-Seine est disponible sur http://www.dissident-media.org/stop_nogent
ou en PDF :

Lettre d’information n°107 mai-septembre 2005 :
http://www.dissident-media.org/stop_nogent/Lettre_CSN_107.pdf

Lettre d’information n°106 janvier-avril 2005 :
http://www.dissident-media.org/stop_nogent/Lettre%20CSN%20106.pdf

Lettre d’information n°105 décembre 2004 :
http://www.dissident-media.org/stop_nogent/lettre_CSN_105.pdf

Lettre d’information n°104 août-novembre 2004 :
http://www.dissident-media.org/stop_nogent/Lettre_CSN_104.pdf

Lettre d’information n°103 juin-juillet 2004 :
http://www.dissident-media.org/stop_nogent/Lettre_CSN_103.pdf

Lettre d’information n°101/102 février-mai 2004 :
http://www.dissident-media.org/stop_nogent/stop_nogent_101_102.pdf

Lettre d’information n° 99/100 août-décembre 2003 :
http://www.dissident-media.org/stop_nogent/Lettre%20CSN%2099-100.pdf

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