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De passage á Hakkari

samedi 25 mars 2006, par Catherine

Après avoir fêté le nouvel an kurde dans la ville de Yüksekova, la mission a passé deux jours dans la ville de Hakkari oú de récents événements ont crée une tension entre forces de l’ordre (officielles ou non) et population (voir articles sur l’affaire de Semdinli et sur la situation de la ville de Hakkari).

Dès notre arrivée dans la ville, le ton est donné : nous sommes accueillis par les forces spéciales de la police (gitem) qui tentent de nous embrouiller et impressionnent visiblement notre chauffeur subitement pressé de nous déposer.

Assez rapidement nous nous rendons effectivement compte que la ville est sous pression en comparaison à celle que nous venons de quitter : dans la rue des blindés circulent, n’hésitant pas à nous viser à la mitrailleuse histoire de nous impressionner. Des militaires, des policiers en civil ou en uniforme sont à chaque carrefour...

Pendant notre séjour de deux jours dans cette ville, nous avons la possibilité de rencontrer une délégation rennaise des droits de l’homme qui réalise un travail de fond sur cette ville notamment en soutenant un atelier de création de kilim (tapis tipique de la région). Atelier que nous visitons.
Cet atelier permet de faire travailler de jeunes femmes issues de familles déplacées c’est-à-dire particulièrement appauvries. Leur travail leur étant payé convenablement l’atelier n’est pas compétitif en Turquie et l’association rennaise ainsi qu’une association suisse travaillent à trouver des débouchés commerciaux en Europe. Notre visite est également l’occasion de réaliser des entretiens sur la question des déplacés. Problématique que la mission avait pu approfondir le matin en se rencontrant l’association de déplacés Göç Der.

Nous profitons aussi d’être dans la capitale du district pour avoir un entretien avec l’adjoint du préfet. Avec son sourire digne d’une publicité pour dentifrice, celui-ci nous dresse évýdemment un tableau idyllique d’une région où tout se passe bien, où le problème des déplacés est résolu à 90%. Du reste, il n’est pas au courant de victimes des manifestations et refuse de se prononcer sur l’attentat de Semdinli puisqu’une affaire est en cours.
Courtoisement, il nous fait comprendre que nous ferions mieux de nous occuper des manifestations qui se déroulent en France et qu’il n’a pas besoin de leçon sur les droits de l’homme.
Ce qui est certain c’est qu’il n’a pas besoin de cours de langue de bois.

Pendant nos deux jours sur place, nous avons dû attendre le maire de Hakkari, bloqué par les dýfférents barrages militaires pendant son retour de Diyarbakir où il s’est rendu pour le Newroz. Nous apprenons alors que ce maire, du parti DTP pro-kurde est menacé de mort et poursuivi pour avoir tenu des propos séparatistes, portant atteinte à la sécurité de l’état et considérés comme un soutien à l’organisation terroriste (PKK).

Enfin de retour sur sa ville, il nous accorde un entretien. Cet homme d’une quarantaine d’années est visiblement inquiet. Il n’hésite pas à nous en faire part. En s’exprimant d’une façon particulièrement claire, il confirme au nom de la liberté d’expression et avec force les propos qui lui sont reprochés. Ce "Kurde qui vit en Turquie", comme il n’hésite pas à se présenter, a déjà réalisé 13 mois de prison en trois fois simplement en détention provisoire.
Il nous explique qu’il est sous le coup de 50 procédures judiciaýres. Mais il nous avoue qu’il a peur.

Ses craintes se confirment rapidement.
Alors que nous arrivons à Beytüssebap, l’étape suivante de la mission, nous apprenons par la télévision que des émeutes ont éclaté à Hakkari.
Probablement au moment de notre entretien avec le maire, l’ancien président du DTP de Hakkari était arrêté par la police. Il lui est reproché d’avoir qualifié Abdullah Öcalan de "Monsieur" et d’avoir déclaré qu’il était le leader des Kurdes malgré son emprisonnement. Les manifestations ont fait 19 blessés.

Il faut savoir que ces déclarations entrent dans le cadre d’une stratégie de rapport de force du parti DTP. En effet : 56 maires DTP sont poursuivis pour avoir déclaré qu’Öcalan était leur leader à l’occasion du Newroz.

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