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Deuxième lettre des jeunes à leurs parents |
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Texte n° 2 des lycéens en lutte d’Arras, des filles et fils d’ouvriers-es et d’employés-es (voir Lettre à nos parents)
Lettre à nos parents n° 2
Arras le 29 mars 2006
Chers parents, voici une nouvelle lettre,
Nous étions 12 000 à Arras le mardi 28 mars et 3 millions dans toute la France à manifester pour exiger le retrait sans condition du CPE et du CNE. Beaucoup de salariés, des Mères et des pères étaient avec leurs enfants dans la manifestation, les uns avec des drapeaux, certains avec des poussettes, et même des mamies et des papys, et pourtant, nous n’étions pas encore assez nombreux pour que M De Villepin retire cette Loi antisociale. Il est vraiment sourd, car bonjour le bruit !
Pour nous lycéens et étudiants, il est clair désormais que le gouvernement et même le Président sont responsables. Ils ont choisi d’agir pour contenter les seuls intérêts des patrons. Les CPE, CNE et CDE (contrat dernier emploi) vont mettre des millions de personnes à la botte des patrons, pourquoi ?
C’est vrai que nous pourrons toujours dire que nous ne sommes pas satisfaits de notre salaire et de nos conditions de travail, que nos éventuelles heures supplémentaires doivent être payées, de demander que nos congés payés soient pris selon notre demande, que le code du travail ou la convention collective soient respectés...que notre dignité soit respectée.
C’est vrai aussi que nous aurons toujours le droit de revendiquer, le droit de vote, le droit de manifester, après tout nous sommes dans un grand pays démocratique, le pays des droits de l’homme et de la liberté...le pays de la Résistance !
Mais c’est aussi vrai que cette Loi permettra aux patrons de nous licencier sans motif, du jour au lendemain...pas content à 14h00, viré-e à 17h00 et basta !
Ces semaines de luttes nous ont permis de nombreux débats. Nous avons désormais compris que le gouvernement cherche à obtenir un contrat de travail qui prévoit la liberté d’embaucher et de licencier sans contrainte. C’est à dire un contrat nouveau vidé de toutes les garanties sociales actuelles. La voie de la précarité généralisée nous est ouverte.
C’est ce qui nous permet d’affirmer que le gouvernement ne pense pas à la réduction du chômage, et que nous les jeunes seront effectivement très touchés par la misère. Derrière ces nouveaux contrats, ce sera une remise en cause totale du droit du travail.
Au nom de leurs ambitions personnelles de présidentiables et de leur égoïsme, au nom de l’ordre patronal et du pouvoir que donne l’argent, Ms Villepin et l’ensemble du gouvernement, sont entrain de sacrifier toute la jeunesse dont je fais partie.
Pour nous lycéens et étudiants, faire abroger le CPE et le CNE, c’est empêcher la création du Contrat Unique qui va vous rendre, vous parents encore plus corvéables et flexibles, licenciables selon la loi du marché, la prise de commandes, la performance individuelle...et la fin de mois sera toujours aussi difficile pour la famille.
Et comme l’a dit le Maire d’Arras au Sénat « même Mme Thatcher n’a pas osé ».
Pour nous, voilà l’état de notre Démocratie, voilà ce qu’il reste après 4 ans de « monarchie absolue et de pouvoir abusif ». Et franchement on peut être inquiets-es, Démocratie et République, seront-elles encore présentes dans notre proche avenir ?
Face au mutisme des hommes politiques à la tête du gouvernement, la liberté de dire Non à l’injustice et au « racisme » sociale n’est elle pas entrain d’être bafouée ? Dans nos discussions avec les autres, ce sont les mots « fasciste et autoritaire » qui reviennent le plus souvent, c’est grave, et beaucoup pensent que la liberté de dire Non et la liberté d’expression sont réellement menacées.
Chers parents, dites le à vos collègues de travail et à vos amis, dites le aux Prof’, nos vies et vos vies, la liberté, sont en danger, la démocratie est en danger !
Mais la jeunesse est courageuse, elle ne laissera pas faire, elle dit « Résistance » !
Pour quelques euro, même si précieux, vous n’avez pas le droit de laisser des acquis et des droits sociaux historiques partir en fumée en quelques mois, au nom d’un « modernisme économique » qui va nous ramener à 100 ans en arrière.
Chers parents, il est impossible que vous me laissiez moins de droits et d’acquis sociaux, moins que Mamy et Papy ne vous ont laissés ?
Maman, Papa, il est impossible que vous, les parents, les salariés-es, laissiez faire car aujourd’hui personne en France ne peut dire qu’il ne sait pas.
Maman, Papa, on n’ira pas en vacances, on n’achètera moins d’habits, on mangera des pâtes s’il le faut, mais quand les syndicats appelleront à la Grève, il faudra la faire, même si la fin de mois est difficile parce que notre avenir est plus important.
Et la grève et les manifestations sont appelées mardi 4 avril, soyons y tous ensemble, toute la famille !
Le gouvernement doit céder, qu’il parte où qu’il reste n’est pas mon problème. Mon problème comme celui des centaines de milliers de lycéens-es et d’étudiants-es en lutte depuis 2 mois, c’est un avenir si sombre, si précaire, si dégradé, qu’on le refuse toutes et tous, et nous irons jusqu’au bout pour qu’il soit meilleur.
Chère Maman, cher Papa, la priorité, c’est mon avenir, celui de mes copines et copains de lutte, et celui, un jour, de vos petits enfants.
Donc la priorité est de faire céder le gouvernement pour qu’il retire cette Loi, point !
Si je lutte aujourd’hui, c’est aussi pour vous et pour toute la famille, pour que demain tous ensemble, nous puissions accomplir, réaliser et partager les mêmes rêves.
Votre enfant qui vous embrasse très fort et qui reste déterminé.
Auteurs divers
Création de l'article : 6 avril 2006
Dernière mise à jour : 6 avril 2006
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