Dans une lettre adressée au PDG de France Télévisions, le président du CSA le « met en garde contre le non respect par France 3 des articles 2 et 3 de son cahier des charges ».
Le Conseil rappelle fort justement que « le cahier des missions et des charges font obligation à la chaîne d’assurer l’expression pluraliste des courants de pensée et d’opinion dans le principe d’égalité de traitement ».
Qu’est-ce qui a donc pu pousser le Conseil à cette mise en garde ?
Est-ce l’omniprésence sur nos antennes des deux candidats à l’élection présidentielle boostés par les sondages et notamment du Ministre et président de l’UMP ?
Est-ce la sous-représentation de tous les autres courants de pensée et d’opinions qui s’expriment dans le pays ?
Est-ce la présence permanente de tous les « spécialistes » de la pensée libérale, que ce soit en matière économique ou sociale ?
Non vous n’y êtes pas du tout ! Ce ne sont pas ces dérives, qui faussent le débat démocratique autour de véritables enjeux de société, que condamne le CSA.
C’est la relation, le 17 mai 2006, du procès des faucheurs volontaires d’OGM réalisée par la station d’Orléans, qui met en émoi les... « sages », qui comme chacun sait sont démocratiquement élus et représentatifs de la diversité des courants d’opinion de notre pays !
Ainsi, le PDG est rappelé à l’ordre, parce que des confrères ont relaté un procès, en pointant du doigt certaines dérives.
Estimer comme le fait le CSA, que « dans le cas d’espèce, la nature très controversée du débat sur les OGM et son traitement dans le cadre d’une affaire judiciaire en cours auraient du inciter la chaîne à faire prévaloir une présentation plus équilibrée des différents points de vue », relève d’une curieuse conception de la liberté de la presse.
Si les « parties civiles », la multinationale de l’agroalimentaire Montsanto en l’occurrence, « ne se sont pas exprimées » le 17 mai, c’est tout simplement parce que les débats du jour lors du procès ne le justifiaient pas.
France 3 Orléans leur avait en revanche donné la parole lors des deux premiers jours du procès les 15 et 16 mai.
Faut-il rappeler au CSA que Montsanto avait auparavant, refusé à maintes reprises, durant de nombreux mois, et notamment en mai, les demandes d’interviews des journalistes d’Orléans, y compris pour participer à une émission contradictoire de débat, « Domaine public » ?
Si des « magistrats s’estimaient diffamés », pourquoi le Parquet, après avoir ouvert une enquête préliminaire pour « discrédit public jeté sur une procédure judiciaire », après avoir fait intervenir la police pour obtenir une copie des journaux télévisés, après avoir fait interroger le Rédacteur en chef et le journaliste concernés, a-t-il classé le dossier ?
Le CSA rappelle fort justement qu’il « ne dispose pas d’une compétence de principe en ce domaine, qu’en l’absence de saisine officielle il n’a pas souhaité se prononcer sur le caractère diffamatoire des propos tenus dans le cadre de ces séquences » et que le « traitement de l’information relève de la liberté éditoriale des diffuseurs ».
Alors, à quoi et pour qui joue le CSA en se montrant plus royaliste que le Parquet d’Orléans et en relançant l’affaire ? Pourquoi n’a-t-il pas auditionné le Rédacteur en chef et les journalistes concernés ?
Le CSA voudrait-il nous faire revenir aux années où l’ORTF était uniquement la voix des pouvoirs politiques ou économiques ?Les années où il suffisait que des protagonistes sollicités refusent de parler pour que des rédacteurs en chefs, reliés par téléphone rouge au Ministre de l’information, décident de ne pas traiter un sujet ?
Nous rappellerons pour notre part au CSA la Charte du journaliste, annexée à notre Convention collective qui stipule que « le journalistes prend la responsabilité de tous ses écrits » et « revendique la liberté de publier honnêtement ses informations ». C’est ce qu’ont fait les journalistes d’Orléans.
Le SNJ-CGT de France 3 est bien décidé à faire respecter la liberté des journalistes et la liberté de la presse. Il apporte tout son soutien à la rédaction d’Orléans.
Question corollaire : jusqu’à quand les magistrats ne pourront-ils pas communiquer sur les procédures et procès en cours ?
Paris le 18 septembre 2006.