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Nucléaire : Le réacteur de 4ème génération c’est le retour des surgénérateurs de type SuperPhénix... |
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Exemple de blabla des nucléocrates :
"Conformément aux voeux exprimés par le président Chirac en janvier 2006, la France s’est fixé pour objectif de construire le prototype d’un réacteur de quatrième génération d’ici à 2020. Ces réacteurs du futur, dont on dit qu’ils permettront de produire cinquante fois plus d’électricité, avec une même quantité d’uranium, que les réacteurs à eau sous pression actuels, représentent une source d’espoir pour répondre aux besoins croissants d’énergie au niveau planétaire. On estime en effet que la consommation primaire d’énergie devrait doubler d’ici à trente ou quarante ans. En minimisant le volume de déchets générés, ces derniers permettent également de limiter les risques de non-prolifération.
Passage à l’échelle industrielle en 2040
Les réacteurs français actuels seront remplacés d’ici à 2015 par des EPR, dont le prototype est actuellement en construction à Flamanville, dans la Manche. C’est à cette date que la construction d’un prototype de réacteurs de génération IV devra démarrer, pour passer à l’échelle industrielle en 2040.
Dans le cadre du Forum international génération IV (GIF), auquel participent douze pays et l’UE, six concepts prometteurs sont actuellement à l’étude. La France s’est focalisée sur une technologie qu’elle a déjà utilisée dans Phénix et Superphénix : la filière des surgénérateurs à neutrons rapides, qui se subdivise en réacteurs à caloporteur sodium et caloporteur gaz. Sur ce point, les choix du CEA semblent se préciser. « D’ores et déjà, le réacteur à neutrons rapides refroidis au sodium (SFR) semble le plus compatible avec l’échéance de 2040, lance Philippe Pradel, directeur de l’énergie nucléaire au CEA. Mais on ne peut pas non plus écarter la filière des réacteurs à neutrons rapides refroidis au gaz, plus prometteuse mais à la fois plus compliquée et plus longue à mettre au point. » "
En réalité, le réacteur de 4ème génération c’est le retour des surgénérateurs de type SuperPhénix...
Des années 60 aux années 80 le programme français reposait sur les réacteurs à eau pressurisée (REP)) et un développement significatif des réacteurs à neutrons rapides (RNR) fonctionnant en mode surgénérateur. Il était envisagé qu’en l’an 2000 les RNR surgénérateurs représenteraient 30% du parc. C’est la raison du développement civil du retraitement des combustibles REP avec la construction des usines du site Hague. A la différence des centrales nucléaires « conventionnelles », et à l’inverse de tout ce qui a été déclaré par la propagande officielle, les surgénérateurs peuvent, par accident, faire explosion à la façon d’une bombe atomique. En effet, ils peuvent étre le siège d’une réaction en chaîne dite « surcritique prompte en neutrons rapides », particularité que seule la bombe atomique possède également. La variété d’explosion atomique dont un surgénérateur peut être le siège porte le nom rassurant d ’« excursion nucléaire »...
Dans les surgénérateurs le refroidissement est au sodium, le seul inconvénient du sodium... il explose au contact de l’eau et s’enflamme à celui de l’air. Autant dire qu’il n’est pas facile à manipuler, et il y a à Superphénix la plus grande quantité de sodium liquide au monde, 5500 tonnes.
SuperPhénix (qui n’a jamais fonctionné correctement) comporte environ 35 tonnes de combustible nucléaire, dont 5 tonnes de plutonium, et les expériences d’excursion nucléaires n’ont jamais concerné que quelques kilogrammes de matière fissile. Il est clair qu’étant donné l’extraordinaire toxicité radioactive des aérosols de plutonium, l’expulsion même partielle des 5 tonnes de plutonium de SuperPhénix dispersés ou volatilisés par l’excursion nucléaire constituerait une catastrophe sans précédent. Car 1/1 000 000 ème de gramme de plutonium inhalé suffit à provoquer un cancer et 8 kilos sont suffisant pour faire une bombe atomique de type Nagasaki.
Les surgénérateurs
A la différence des centrales nucléaires « conventionnelles », et à l’inverse de tout ce qui a été déclaré par la propagande officielle, les surgénérateurs peuvent, par accident, faire explosion à la façon d’une bombe atomique. En effet, ils peuvent étre le siège d’une réaction en chaîne dite « surcritique prompte en neutrons rapides », particularité que seule la bombe atomique possède également.
"Excursions nudéaires"
La variété d’explosion atomique dont un surgénérateur peut être le siège porte le nom rassurant d ’« excursion nucléaire ». Plusieurs excursions nucléaires successives peuvent se produire. Le problème est de savoir si ces explosions pourront être contenues par les enceintes prévues autour du réacteur. Les experts ont donc cherché à évaluer la puissance de ces explosions.
Pour le réacteur SuperPhénix, qui doit être installé à Malville, à 44 kilomètres de Lyon, les estimations quant à l’équivalent en explosifs classiques de l’excursion nucléaire vont de quelques tonnes à quelques dizaines de tonnes d’explosifs si l’on considère l’énergie totale libérée, de quelques centaines de kilogrammes à quelques tonnes pour l’énergie mécanique. Ces valeurs selon les optimistes, sont à la limite de ce que peuvent contenir les enceintes prévues.
De plus, ces résultats ont été obtenus à l’aide de modèles de calcul comportant de nombreuses hypothèses simplificatrices, et reposent sur une base expérimentale extrêmement mince. En effet SuperPhénix comportera environ 35 tonnes de combustible nucléaire, dont 5 tonnes de plutonium, et les expériences d’excursion nucléaires n’ont jamais concerné que quelques kilogrammes de matière fissile. Si l’on se rappelle les difficultés du calcul de l’explosion d’une structure beaucoup plus simple, celle de la bombe atomique, et le nombre d’expériences qui ont été nécessaires pour la mettre au point, on ne peut qu’être très sceptique quant aux résultats des calculs relatifs aux excursions nucléaires.
Il est clair qu’étant donné l’extraordinaire toxicité radioactive des aérosols de plutonium, l’expulsion même partielle des 5 tonnes de plutonium de SuperPhénix dispersés ou volatilisés par l’excursion nucléaire constituerait une catastrophe sans précédent.
Déformation brutale du coeur...
Sur les sept surgénérateurs producteurs d’électricité qui ont déjà fonctionné, trois (EBR1, Enrico Fermi, BN 350) ont eu de graves accidents, proportion jamais vue dans aucune autre filière. Les documents officiels français indiquent que la valeur numérique de la probabilité d’excursion nucléaire n’a pas été calculée. De nombreuses causes peuvent être à l’origine d’excursions nucléaires. On envisage par exemple une déformation brutale du coeur par propagation rapide d’une rupture d’assemblage, déformation qui entraverait la circulation du sodium réfrigérant et empêcherait les barres de contrôle de fonctionner. On peut craindre également la formation d’une masse surcritique locale à la suite d’une fusion partielle, ce qui provoquerait une compaction du reste du coeur et une exursion nucléaire d’ensemble. On peut envisager enfin des pannes simultanées d’organes essentiels, l’éjection de barres de contrôle, des fautes au déchargement, un sabotage.
Les pays étrangers font preuve d’une grande prudence. Les Etats-Unis, à la suite des accidents d’EBR1 et d’Enrico Fermi, hésitent à lancer la filière des surgénérateurs. La Grande-Bretagne construit ses surgénérateurs dans la seule région quasi-désertique qu’elle possède, l’extrême-Nord de l’Ecosse. L’URSS n’ose pas passer directement de 350 à plus de 1.000 Mégawatts électriques, et construit un réacteur de 600 Mégawatts électriques.
Il ne saurait exploser.
En France, des dirigeants incompétents et des technocrates audacieux ont décidé de sauter allègrement de 250 (Phénix) à 1.200 Mégawatts électriques (SuperPhénix), et d’implanter entre Lyon, Grenoble et Genève le premier surgénérateur géant. Ces responsables formulent des assertions n’ayant aucun rapport avec la réalité, telles que « on notera tout d’abord qu’il est physiquement impossible à un réacteur nucléaire d’exploser comme une bombeatomique » (rapport d’Ornano, novembre 1974), ou « un réacteur nucléaire n’a, en effet, rien à voir avec une bombe atomique. Il ne saurait exploser » (l’Energie Nucléaire, Délégation générale à l’information, avril 1975). Ils glissent dans leurs publicités des phrases mensongères : « La centrale atomique utilise un combustible impropre à une fission explosive » (publicité EDF, Paris-Match, juin 1975). Tout cela est contredit par ces phrases du style télégraphique, qui concernent les surgénérateurs :
Potentiel accidentel d’excursion nucléaire prompte critique sous l’effet de compaction, libérant de l’énergie mécanique sous forme explosive (Commissariat à l’Energie Atomique, Bulletin d’Informations Scientifiques et Techniques, n°208, novembre 1975, page 33) et : « Potentiel d’explosions dues à interactions violentes Na - UO2 fondu. Processus peut se coupler avec explosion nucléaire » (idem, page 34).
On leur a menti...
Les populations de la région Lyon Grenoble Genève ont-elles été consultées quant à l’implantation de SuperPhénix à Malville ? Ont-elles été simplement informées des problèmes posés par la sécurité de ce réacteur ? La réponse est malheureusement négative : elles n’ont pas été consultées, elles n’ont pas été informées, et de plus on leur a menti.
Extrait de la Gazette Nucléaire n°1, juin 1976.
Publication du GSIEN (Groupement des Scientifiques pour l’Information sur l’Energie Nucléaire)
Lire : Quelques vérités (pas toujours bonnes à dire) sur les surgénérateurs (en PDF) Sciences & Vie n°781, octobre 1982.
Le programme nucléaire français [des années 70] implique le développement rapide des surgénérateurs.
Compte tenu de la mauvaise utilisation de l’uranium naturel dans les filières à eau légère et des faibles ressources mondiales d’uranium, le développement du nucléaire peut se faire suivant deux stratégies :
1. Le nucléaire est considéré comme une énergie d’appoint qui permettra d’attendre l’arrivée des énergies inépuisables solaire, géothermie. Son développement sera lent afin d’économiser l’uranium. Il sera modeste afin de dégager les moyens nécessaires au développement industriel des énergies nouvelles.
2. Le nucléaire est développé à marche forcée. C’est la stratégie actuelle de la France. Selon cette stratégie, le nucléaire représenterait 25% de l’énergie primaire en 1985, 40% en l’an 2000. A ce rythme de développement la France épuisera ses propres réserves d’uranium en dix ans. Il faut donc trouver rapidement un relais aux centrales nucléaires actuelles : ce relais, c’est le surgénérateur. Un programme ambitieux a donc été lancé avec comme première étape la construction, à Creys-Malville (Isère) du surgénérateur géant Superphénix (1200 MWe) qui devrait bientôt être suivi de plusieurs surgénérateurs de 1800 MWe dans la région de Chalons-sur-Saône.
Ce programme est officiellement justifié par des raisons techniques : le caractère limité des réserves d’uranium, l’avance technologique - incontestable - du CEA dans ce domaine. Mais comme toujours les arguments techniques masquent les choix économiques et politiques faits par les grands groupes industriels, en l’occurence Creusot-Loire. Ce groupe qui a déjà - via Framatome - le monopole de la construction des centrales à eau légère (PWR), aura - via Novatome - la haute main sur la construction des surgénérateurs. Le rôle dominant de Creusot-Loire dans Novatome a été obtenu à la suite :
1. d’une restructuration industrielle à son profit : dans le secteur sidérurgique, prise de contrôle de NEYRPIC à la suite d’un accord avec Alsthom en décembre 1976, accord avec CEM et Alsthom pour la construction des turboalternateurs.
2. du démantèlement des services compétents du CEA : le transfert de l’équipe d’ingénieurs de Superphénix (composée d’agents du CEA (Technicatome) et de l’ex-GAAA) à Novatome devrait intervenir dans les deux mois. Les compétences du CEA, acquises grâce à l’argent du contribuable français, sont ainsi offertes en cadeau au baron Empain !
La logique du programme de développement forcené de l’énergie nucléaire conduit les pouvoirs publics à faire des impasses, à griller des étapes. Tout se passe comme si on voulait rendre le choix du « tout nucléaire » irréversible (avant l’arrivée de la gauche au pouvoir ?!). L’opposition à la construction du Superphénix se développe-t-elle ? On essaie de la prendre de vitesse. « Nous ressentons de la manière la plus nette que la meilleure façon de contrecarrer la contestation se développant au plan local et national est d’engager au plus vite, de manière irréversible l’opération et de rendre publique cette décision » Marcel Boiteux, septembre 1976 (information « provenant » de la Nersa).
Effectivement, avant que le décret d’autorisation de création (terme de la procédure de sécurité) et que la déclaration d’utilité publique ne soient signés, les travaux de génie civil ont commencé sur le site le 15 novembre 1976 (les fondations sont actuellement pratiquement terminées). Bel exemple de politique du fait technocratique accompli
Le développement rapide de surgénérateurs est-il acceptable ? est-il réaliste ?
Il peut être tentant, pour résoudre la. pénurie prévisible d’uranium, d’avoir recours aux surgénérateurs : ils permettent, théoriquement, de multiplier les réserves d’uranium par un facteur 50 au moins. Mais quand on passe de la théorie à la pratique, les perspectives sont moins brillantes :
1. Les surgénérateurs sont encore plus inquiétants que les PWR
La matière fissile y est si concentréè qu’il peut s’y produire des explosions de type nucléaire (voir plus loin un extrait du rapport d’une très officielle commission britannique). Le réfrigérent (sodium, liquide) explose au contact de 1’eau et prend feu au contact de l’air. Le développement des surgénérateurs nous fait entrer dans la société du plutonium. Des quantités industrielles de ce produit seront manipulées.
2. Leur fonctionnement est très difficile à assurer
Sept surgénérateurs producteurs d’électricité ont fonctionné dans le monde :
EBR1 (USA ; 0,2 MWe) a été détruit en 1955 par un accident (fusion du coeur).
EBR2 (USA, 16 MWe) fonctionne correctement depuis 1963.
Enrico Fermi (USA, 66 MWe) a démarré en 1963. Il a subi en 1966 une fusion partielle qui aurait pu conduire à une, catastrophe. Remis en service en 1968, il a été définitivement arrêté depuis.
DFR (Grande-Bretagne, 15 MWe) a démarré en 1959. Il a été arrêté en 1976 après un fonctionnement assez satisfaisant.
PFR (Grande-Bretagne, 250 MWe) a démarré en 1975 avec deux ans de retard. Il n’a pas encore atteint sa puissance maximale en raison de nombreux essais technologiques. [Lire : Le surgénérateur tel que le critiquent officiellement les Anglais, Science & Vie n°711 (en PDF), décembre 1976]
BM 350 (URSS, équivalent à 350 MWe) a démarré juste avant Phénix, mais a eu plusieurs accidents dus au sodium en 1974. Depuis, il a un fonctionnement irrégulier.
Phénix (France, 250 MWe) a connu un début remarquable en 1974-1975, mais ses performances se sont dégradées sans cesse depuis. Arrêt du 24.11.75 au 13.12.75 pour fuite dans un générateur de vapeur, fonctionne à puissance réduite de juillet à octobre 1976 pour fuite de sodium secondaire ; arrêt complet depuis le 5 octobre 76 pour fuite de sodium dans un autre échangeur. Il devrait redémarrer au début de mai 1977. On nous dit que la panne qui a occasionné cet arrêt n’est pas grave, ceci est tout à fait exact, mais alors quelle aurait été la durée de l’arrêt si la panne avait été plus sérieuse ?
3. Le combustible des surgénérateurs n’existera peut-être jamais à l’échelle industrielle
Ce combustible est le plutonium. Ce corps n’existe pas dans la nature ; il faut l’extraire des combustibles irradiés provenant actuellement des réacteurs PWR, plus tard des surgénérateurs. Or, pour le moment, on ne sait pas extraire industriellement le plutonium produit par le PWR.
4. Les crédits alloués aux surgénérateurs hypothèquent l’avenir
Le coût de Superphénix ne cesse d’augmenter : de 3 MF au départ il dépasse actuellement 5 MF. Il est évident que la somme des études de toutes natures et des investissements indispensables pour amener la filière à un stade véritablement industriel est considérable : on a vu que toute une série de problèmes techniques complexes ne sont pas encore résolus : sécurité, retraitement des combustibles, amélioration du coefficient de surgénération. Les résoudre demandera du temps et de l’argent, ceci d’autant plus que, comme nous le verrons plus loin, nous sommes seuls à mettre au point cette filière. Consciente du problème, la direction d’EDF, qui a déjà beaucoup de difficultés à financer le programme de construction des PWR, refuse de payer le surcoût que représente la mise au point de Superphénix.
Que se passe-t-il à l’étranger ?
La Grande-Bretagne projetait de construire, dans l’extrême-nord de 1’Ecosse, un surgénérateur de la taille de Superphénix. En septembre 1976, la très officielle Royal Commission on Environnemental Pollution remettait un rapport qui constitue un réquisitoire, non pas contre l’énergie nucléaire, mais contre un développement important des surgénérateurs. Citons les paragraphes 115 et 116 (traduction de Charles Noël Martin)
115. Tout comme le réacteur thermique, le réacteur à neutrons rapides n’est possible qu’à cause d’une particularité de la nature : l’existence des neutrons différés (neutrons émis par des radios-isotopes quelques secondes après la fission du noyau d’uranium). Si la réactivité se trouve encore augmentée notablement et très rapidement, les mécanismes de contrôle de la réactivité risquent d’être dépassés ; il existe alors une probabilité théorique de formation accidentelle d’un sous-ensemble critique aux seuls neutrons rapides et prompts, c’est-à dire non différés.
C’est, sur le plan technique, le principe même d’une explosion nucléaire, bien que le processus de la réaction en chaîne soit nettement plus lent que dans le cas provoqué de la bombe atomique et, de ce fait, l’énergie libérée en serait d’autant moindre. On ne sait pas encore très exactement si une explosion de ce type aboutirait à la vaporisation du combustible ; on suppose en général qu’il pourrait l’être et les plans des réacteurs sont faits en prévision de cette éventualité extrême. Si cette sécurité s’avérait insuffisante, non seulement l’iode et le césium seraient libérés, mais également des quantités substantielles de produit de fission non volatils, tels le strontium, ainsi que du plutonium. Au cas où le réacteur serait construit dans un endroit habité, les pertes en vies humaines seraient très grandes. La raison pour laquelle cela peut se produire dans un réacteur rapide et non dans un réacteur thermique vient de ce que le premier a son combustible dans un état initial de réactivité en dessous du maximum de réactivité. Si tout le combustible d’un réacteur thermique se trouvait fondu en une seule masse, sa réactivité tomberait car il n’y aurait pas de modérateur (qui freine les neutrons) pour accroître la réactivité. Par contre, dans le cas de surgénérateur, tout le combustible fondu en une masse compacte la verra dans un état de réactivité maximum.
116. Les deux fusions du coeur dans les FBR (Fast Breeder Reactor) américains ont été heureusement contenues et il n’y a pas eu libération de radioactivité à l’extérieur mais une fusion non contenue aurait des conséquences tellement catastrophiques (voir le paragraphe 303) que l’opinion prévaut selon laquelle les réacteurs rapides ne pourront jamais apporter une contribution majeure à un programme de puissance, du moins pas avant que les processus sous-jacents aux modifications de géométrie du coeur soient parfaitement connus. Les recherches dans ce champ d’idées sont activement menées sans qu’on sache encore maintenant s’il sera jamais possible de dessiner un jour un réacteur de ce type qui élimine complètement la possibilité d’un sursaut local d’énergie capable de rompre les protections les plus fortes soient-elles.
A la suite de ce rapport, la décision de construire ce surgénérateur, qui devait être prise à l’automne dernier, a été reportée à une date indéterminée par le ministre britannique de l’industrie.
L’URSS avait sagement choisi de passer de 350 MWe (BN 300) à 600 MWe (BN 600 en construction à Bielogrask, dans l’Oural). Des bruits non confirmés indiquent que l’URSS arrêterait son programme de surgénérateur en raison de difficultés pour maîtriser les problèmes du générateur de vapeur. Cette décision serait cohérente avec le grand programme de mises en valeur des gigantesques ressources pétrolières et gazières de la Sibérie.
Comme nous l’avons déjà indiqué, les Etats-Unis ont décidé, pour des raisons politiques (risques de prolifération de l’arme nucléaire), mais aussi économiques (difficultés industrielles et coût du retraitement) de ne pas retraiter les combustibles irradiés. Cette décision condamne actuellement tout programme de développement de surgénérateurs. Récemment le président Carter a même porté un coup très grave au projet américain de Clinch-River (projet de prototype de surgénérateur) en déclarant que celui-ci « portait un risque potentiel pour la sécurité »
Superphénix est un nouveau Concorde
La France développe, encore une fois une technique dont personne ne veut. Mais la comparaison avec Concorde s’arrête là.
La mise au point des surgénérateurs (retraitement des combustibles, sécurité, coefficient de surgénération) sera beaucoup plus difficile que la mise au point de Concorde. Cela prendra donc plus de temps d’argent.
Les risques de prolifération de l’arme nucléaire rendront, si l’on ose dire, encore plus difficile l’exportation des surgénérateurs que celle de Concorde.
On ne voit pas bien ce qui pourra arrêter l’opposition à la construction de Superphénix à Creys-Malville, au contraire, celle-ci ne fait que se renforcer :
occupation pacifique du site en juillet 76
appel « Non à Superphénix » paru en juillet 76 dans Le Monde
votes négatifs des conseils généraux d’Ilsère et de la Savoie.
appel des Scientifiques du CERN (Centre européen de recherche nucléaire) en novembre 1976.
les assises de Morestel de février 1977.
action de harcèlement contre le chantier (court circuit, blocage de l’entrée). vol de documents à la Nersa.
Le 16 octobre 1969 Marcel Boiteux (déjà lui !) expliquait la décision de la Direction d’EDF d’abandonner la filière « graphite-gaz » au profit de la filière Westinghouse de la manière suivante : « continuer, en France, dans nos petites frontières, à poursuivre une technique à laquelle le monde ne s’intéresse pas, cela n’a plus de sens » - Nous ne doutons pas qu’à 8 ans d’intervalle, M. Boiteux ne se déjugera pas et qu’il proposera prochainement au gouvernement, qui suit si fidèlement ses recommandations, d’arrêter Superphénix. Le malheur, pour lui, c’est que, sans surgénérateur, le programme de développement massif du nucléaire n’a plus de sens.
Extrait de la Gazette Nucléaire n° 8-9, avril-mai 1977.
Chronologie des événements :
1945
Enrico Fermi propose le concept de surgénérateur
1946
Construction du petit réacteur rapide américain Clementine (refroidi au mercure)
1951
Divergence du premier réacteur (US) refroidi au sodium, EBR1
29 novembre 1955 - Excursion de puissance du petit surgénérateur en raison de fausses manoeuvres sur les barres de contrôle. La puissance double tous les deux dixièmes de seconde. Le processus est arrêté par retrait de la couverture en uranium naturel. Fusion de 40 à 50 % du coeur. Pratiquement pas d’irradiation du personnel.
1959
Mise en service à Obninsk d’une centrale à neutrons rapides (12 MW électriques).
1959
Lancement de la construction de Rapsodie (20 Mwatts thermiques)
1963
Surgénérateurs Enrico Fermi (USA, 66 MWe)
1965
Mise en service d’EBR2, RNR d’une puissance de 20 Mwatts électriques. Arrêt en 1995.
5 octobre 1966 - "On a failli perdre Detroit" - Une pièce de métal ayant entravé la circulation du sodium, deux assemblages d’éléments combustibles du surgénérateur fondent. Pendant un mois les ingénieurs n’osent pas intervenir de peur de former une "masse critique" dans le coeur. La réparation durera quatre ans. L’activité relâchée dans le sodium et le gaz de couverture a été estimée à environ 10 000 Curies.
1967
Divergence de Rapsodie
(Le démantèlement de Rapsodie s’est avéré fort délicat, a conduit à une grave explosion sodium avec mort d’homme.)
1968
Début de construction de Phénix (250 Mwatts électriques)
1968
Divergence de BOR60 (URSS) RNR de 12 Mwatts électriques (60 Mwatts thermiques). Encore en fonctionnement.
1970
Arrêt pour cause de mauvais fonctionnement du RNR Enrico Fermi (60 Mwatts thermiques)
1972
Divergence de BN350 (URSS) RNR de 1000 Mwatts thermiques et 150 Mwatts électriques. Fonctionnement irrégulier.
Le sodium est une substance délicate à manipuler car il s’enflamme au contact de l’air et explose au contact de l’eau.
Septembre 1973 - 400 kg d’eau passent dans le circuit secondaire de sodium (non radioactif), d’où explosion sodium-eau, rupture des membranes d’éclatement, rejet à l’atmosphère et inflammation spontanée de l’hydrogène produit. L’incendie a été détecté par les satellites américains. On ignore le nombre des victimes éventuelles.
Février 1975 - Introduction de 800 kg d’eau dans le circuit secondaire de sodium, détérioration d’un générateur de vapeur, feu de 300 kg de sodium.
1973
Divergence de Phénix. Il a connu un début remarquable en 1974-1975, mais ses performances se sont dégradées sans cesse depuis.... Arrêt du 24.11.75 au 13.12.75 pour fuite dans un générateur de vapeur, fonctionne à puissance réduite de juillet à octobre 1976 pour fuite de sodium secondaire ; arrêt complet depuis le 5 octobre 76 pour fuite de sodium dans un autre échangeur...
1973
Début de construction du RNR US de Clinch River (400 Mwatts électriques). Contestation anti-nucléaire aux USA.
1973
Création de la société NERSA réunissant EDF (51%), ENEL (analogue italien d’EDF) (33%) et RWE (analogue d’EDF pour l’état de Rhénanie-Westphalie) (16%). NERSA est chargée de la réalisation et de la future exploitation de Superphénix. Une autre société, avec des parts symétriques des partenaires allemands et français, était créée pour réaliser un réacteur similaire en Allemagne, réacteur qui ne vit jamais le jour.
1974
Divergence de la centrale PFR (GB) d’une puissance de 250 Mwe, analogue à Phénix. Cette centrale sera arrêtée en 1994.
1976
Début de la construction de Superphénix
"IL N’EST PAS DERAISONNABLE DE PENSER QU’UN GRAVE ACCIDENT SURVENANT A SUPERPHENIX POURRAIT TUER PLUS D’UN MILLION DE PERSONNES."
Extrait d’un article de J-P. PHARABOD dans Sciences et Vie n°703 avril 1976 p. 101.
Pour ceux qui douteraient de la compétence de l’auteur de ces lignes, nous indiquerons que J-P. PHARABOD a travaillé pendant sept ans et demi au CEA et à EDF. Il a participé aux essais des réacteurs Chinon I et Saint Laurent I et à de nombreuses études de contrôle et de sûreté. Il a démissionné d’EDF en 1970 et est actuellement ingénieur au Laboratoire de Physique Nucléaire des Hautes Energies à l’Ecole Polytechnique.
2 mai 1977
Décret de déclaration d’utilité publique de la centrale de Creys Malville.
12 mai 1977
Décret d’autorisation de création de la centrale de Creys Malville.
30 et 31 juillet 1977
60 000 manifestants contre 5 000 gendarmes, sous un déluge de pluie et 2 500 grenades à effet de souffle. Un mort, Vital Michalon. Deux mutilés, Michel Grandjean et Manfred Schultz. Une centaine de blessés. (Lire : Mémento Malville, Une histoire des années soixante-dix)
En 1977 au Japon, mise en marche de Joyo, le surgénérateur expérimental qui ne produit pas d’électricité ; par la suite, construction du surgénérateur Prototype Monju ; mise en marche en août 95 de sa production d’électricité.
Mai 1981
Selon des informations, non confirmées officiellement, la cuve principale aurait été fêlée lors de son installation. Il aurait fallu pratiquer des soudures de rattrapage.
Juin 1981
Début de la livraison du sodium sur le site.
Novembre 1981
Une charge du pont tournant tombe d’une quarantaine de mètres sur le couvercle en béton, qui résiste.
1984
A la suite de travaux de consolidation du pont tournant, une étude montre que ce pont ne résisterait pas à certains types de tremblements de terre et pourraittomber d’une hauteur de soixante mètres sur le réacteur. La direction n’en tient pas compte.
Royaume-Uni, 1984 - Réacteur PFR, rupture de tuyaux au générateur de vapeur... fermeture définitive du surgénérateur.
Allemagne, 1984/85 - Fuites et incendie de sodium au réacteur Kalkar, non démarrage du réacteur, fermeture définitive.
Début 1985
Un robot, chargé de la vérification des soudures, tombe entre les deux parois de la cuve principale. Le programme se poursuit.
Septembre 1985
Mise en marche du surgénérateur.
Janvier 1986 à février 1987
Suite à divers incidents techniques, arrêts provisoires du réacteur.
8 mars 1987
Début de la fuite de 20 tonnes de sodium du barillet, dispositif permettant la charge et la décharge des éléments combustibles. La fuite ne sera décelée que trois semaines plus tard.
26 mai 1987
Arrêt de la centrale.
Mars 1988
Des clichés, réalisés par le robot détecteur de fuites avant sa chute en 1985, se révèlent douteux. Ils n’avaient pas attiré l’attention à l’époque.
12 janvier 1989
Remise en marche du réacteur, qui atteint sa pleine Puissance en septembre.
2 octobre 1989
Chute d’un engin de 1.300 kg sur le dôme du réacteur.
1989
Saute de puissance pour raison inconnue au surgénérateur Phénix.
1989
La résistance des habitants de Genève contre la remise en marche de Superphénix se manifeste de nombreuses façons.
Avril 1990
Le surgénérateur de Dounreay est arrêté après qu’une fuite de sodium liquide ait eu lieu à partir du secondaire et qu’il se soit enflammé au contact de l’air. Les autorités affirment qu’il n’y a pas eu de fuite de radioactivité dans l’environnement. Il a fallu plusieurs semaines avant que l’accident ne soit rendu public.
29 avril 1990
Alors que Superphénix était à l’arrêt, fuite de sodium sur un des 4 circuits principaux d’évacuation de puissance imposant la vidange immédiate de tout le sodium du circuit incriminé (400 tonnes).
Juillet 1990
Arrêt de Superphénix pour cause de défaut électrique.
Août 1990
Troisième arrêt de l’année pour cause d’oxydation du sodium. Cet arrêt se prolongera quatre années.
Septembre 1990
Les citoyens suisses approuvent lors d’un référendum le moratoire nucléaire sur le sol de la Confédération.
Décembre 1990
Effondrement du toit de la salle des machines (contenant les turboalternateurs) de Superphénix sous le poids de 80 cm de neige. Ce n’est pas grave, disent les porte-parole d’EDF : le surgénérateur était dans la pièce à côté.
Mai 1991
Le Conseil d’État français conclut à l’illégalité des décisions de redémarrage de l’année précédente.
Avril 1992
Le conseil régional Rhône Alpes demande une nouvelle enquête d’utilité publique avant toute nouvelle remise en marche.
Juin 1992
Le gouvernement Bérégovoy suspend le redémarrage à la réalisation de travaux pour faire face aux feux de sodium.
1993
Multiples manifestations contre le redémarrage en France et en Suisse.
Avril 1994
Une centaine de kilos de sodium provoquent une explosion à Cadarache, soufflent une dalle de béton de 300 m2 et tuent le principal expert français de feux de sodium.
11 juillet 1994
Décret autorisant le redémarrage en laboratoire de recherche pour une incinération des déchets radioactifs.
4 août 1994
Redémarrage de Superphénix.
Novembre 1994
Arrêt de Superphénix suite à des fuites de vapeur et d’argon.
7 décembre 1994
Redémarrage de Superphénix
25 décembre 1994
Nouvel arrêt. Une fuite d’argon a été détectée.
22 août 1995
Redémarrage de la centrale à 30 %.
23 octobre 1995
Nouvel arrêt. Au dixième anniversaire de la mise en service, le bilan s’établit à 174 jours de fonctionnement durant les cinq premières années et à deux jours durant les cinq années suivantes.
Japon, 8 décembre 1995
Incendie au surgénérateur de Monju. Nous fûmes là à un tout petit doigt d’une explosion hydrogène. Si cet accident s’était produit à côté du coeur où se trouve condensée plus d’une tonne de plutonium quelles auraient pu être les conséquences ?
22 décembre 1995
Redémarrage à 30 %. Plus tard, passage à 60 % et 90 %.
24 décembre 1996
Superphénix est arrêté en vue de sa transformation en incinérateur de plutonium.
28 février 1997
Annulation par le Conseil d’État de l’arrêté du 11 juillet 1994
5 mars 1997
Corinne Lepage, ministre de l’environnement dans le gouvernement d’Alain Juppé, s’élève contre le projet consistant à faire redémarrer Superphénix Abandon du projet d’incinération afin d’éviter une nouvelle enquête publique.
Juin 1997
Dominique Voynet, ministre de l’environnement dans le gouvernement Jospin, annonce l’abandon de Superphénix et l’étude d’un plan pour dédommager les partenaires européens, résoudre les problèmes sociaux et sauvegarder les intérêts des communes concernées.
Janvier 1998
Le Conseil des Ministres confirme que Superphénix ne redémarrera pas.
Les surgénérateurs a la casse
Vous en souvenez-vous ? Dans les années 70, le CEA et l’EDF prévoyaient qu’en l’an 2000, le quart de la puissance nucléaire installée serait délivré par des surgénérateurs. Francis Sorin, l’un des chantres du nucléaire, indiquait, dans le numéro de mars-avril 1976 de la « Revue Générale Nucléaire », que « leur puissance totale pourrait être de 10.000 MWe en 1990 selon les projets d’EDF ». Alors que Superphénix (1.200 MWe) n’était pas encore fermement décidé, Monsieur Dürr, dans une note EDF-REAL/GIN 1976, précisait « Dès à présent, nous préparons le palier ultérieur de puissance, celui de 1.800 MWe, dont nous pensons qu’il correspond à la taille la plus avantageuse pour les réacteurs à neutrons rapides ».
Cette mégalomanie débridée s’accompagnait de pressions de type mafieux de la part des promoteurs du projet. Ainsi, dans une note confidentielle destinée à l’information de Monsieur Marcel Boiteux, alors Directeur général d’EDF, un certain EdR, d’EDF/NERSA, écrivait carrément le 10 septembre 1976 : « Nous ressentons de la manière la plus vive que la meilleure façon de contrecarrer la contestation se développant est d’engager au plus vite, de manière irréversible, l’opération (N.B. Superphénix) et de rendre publique cette décision ». Suivaient des conseils précis quant à l’acquisition de la « Déclaration d’Utilité Publique », au désenlisement du « Décret d’Autorisation de Création », à la distribution massive d’un bulletin de propagande (« Creys-Malville Informations »), à la non-interruption du chantier, etc... Pressions suivies d’effet puisque le projet était définitivement adopté, et placé sous la protection des Ministères de l’Intérieur et de la Défense : la grande manifestation de l’été 1977 était durement réprimée, et Vital Michalon abattu.
Il est vrai - et les contestataires de l’époque ne le savaient pas - que ce projet avait, entre autres, un but militaire. Il a fallu attendre janvier 1978 pour que Le Monde reproduise des déclarations du général Thiry, ancien directeur du centre d’expérimentations nucléaires du Pacifique, indiquant que le plutonium (d’excellente « qualité militaire ») produit dans les couvertures des surgénérateurs servait à faire des bombes. Ceux qui avaient pris la peine de lire attentivement le rapport d’activité annuel du CEA en 1973 le savaient, mais ils n’étaient pas légion.
Et maintenant, qu’en est-il ? Après avoir subi l’adjonction en catastrophe de dispositifs supplémentaires de refroidissement de secours, après avoir démarré avec quatre ans de retard sur les prévisions initiales, Superphénix végète lamentablement de fuites de barillet en chute d’engins sur le dôme. Il a probablement consommé plus d’électricité qu’il n’en a produit (en effet, il consomme une centaine de MWe à l’arrêt). Le coût, qui était prévu à 1,8 milliardsde francs en 1973, à 4,4 milliards de francs en 1976, est finalement de plus de 25 milliards de francs. Sous la pression de nos voisins européens, qui en ont payé près de la moitié, il semble que la décision ait été prise en 1986 d’abandonner l’utilisation à des fins militaires : du coup la couverture fertile d’uranium 238 va être progressivement remplacée par des barreaux d’acier...
Echec total donc, perte sèche pour la communauté nationale, scandale digne des abattoirs de La Villette... Les responsables sont-ils inquiétés ? Rassurez-vous, braves gens, il n’en est pas question. Ils se sont reconvertis discrètement, ou courent le monde de congrès en congrès, essayant de propager ce qu’ils croient encore être la bonne parole. Parfois même, on leur donne des médailles...
Extrait de la Gazette Nucléaire n°100, mars 1990.
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Création de l'article : 15 juin 2007
Dernière mise à jour : 7 juin 2007
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