Accueil > Comprendre, Agir > Education > Réforme du système scolaire : exercice d’application

Réforme du système scolaire : exercice d’application

mardi 29 janvier 2008

la bureaucratie à l’œuvre parmi les inconséquences des pratiques politiciennes ou l’art de gaspiller de l’argent tout en méprisant les fonctionnaires.

Situation :
Ville de province au passé historique chargé, elle comprend une grande industrie de dimension mondiale et une autre encore plus grande à proximité. Ce bassin fortement industriel fait partie d’une région rurale qui développe ses atouts. La ville comprend à l’origine deux lycées : le lycée de garçons à l’architecture du fin XIXe qui est devenu le lycée du centre ville. Le lycée de jeunes filles devenu trop petit a été fermé en 1991 et a été remplacé toujours en 1991 par un nouveau lycée à l’architecture moderne situé un peu plus en périphérie. Dans les années 1960, à proximité d’un quartier HLM, une cité scolaire avait été construite dans le plus pur style HLM. Cette cité comprend surtout des formations technologiques industrielles et tertiaires du CAP jusqu’au BTS. L’ancien lycée de garçons situé au cœur de la ville est le plus réputé et abrite une bonne partie des formations supérieures BTS. La cité scolaire a concentré ses dernières années pas mal de problèmes de discipline et les élèves n’apprécient guère l’architecture et l’image dépassée des bâtiments. Avec l’arrivée des classes d’âge creuses, les effectifs ont diminué et ces dernières années des postes ont été supprimés comme partout ailleurs. Aucun des trois lycées n’est au complet et ils sont donc sous-utilisés.

Le conflit :
Disposant de plus de place, le nouveau lycée à partir de 1991 s’est doté de classes technologiques (STT puis STG ). Prévu pour 1200 élèves, ce lycée n’a jamais été complètement rempli. Au début des années 2000, il a atteint 1125 élèves notamment grâce à trois classes de terminale et trois classes de première STT. Vers le 21 janvier 2008, le proviseur reçoit la dotation générale des horaires pour la rentrée de 2008-2009 et constate que la moitié des classes restantes de STG sont supprimées, ce qui présage que l’autre moitié sera supprimé à la rentrée suivante. Ces mesures sont prises dans le cadre de la réforme des lycées professionnels et des lycées généraux. La filière sciences et technologie de la gestion devrait d’après ce qui se dit disparaître vers 2010 pour être intégré dans les bacs professionnels en trois ans et donc à terme rejoindre les actuels lycées professionnels.

Quelques rumeurs couraient ces dernières semaines et l’information a été officialisée par le proviseur car le lundi 28 janvier 2008, la réunion annuelle de fixation des budgets horaires se tient au rectorat pour valider ces suppressions de postes. En réalité, les trois proviseurs de la ville devaient s’entendre pour rendre 2 postes au rectorat. Le choix s’est porté sur le nouveau lycée avec l’argument qu’il ne possédait pas de classe de BTS et n’offrait donc pas cette poursuite d’études à ses élèves. Il s’agit d’une information purement comptable, aucune autre information directe n’a été faite ni au proviseur ni aux professeurs concernés. Les proviseurs devaient simplement indiquer où allaient être supprimés ces deux postes. La nouvelle a surpris tout le monde surtout qu’elle ne s’accompagne d’aucune analyse de l’environnement. En effet, dans ce nouveau lycée règne une bonne ambiance entre les professeurs et les résultats scolaires au bac sont en progression, spécialement dans les classes de STG. Les élèves de classe de première sont furieux car une partie d’entre eux devront changer de lycée en classe de terminale et ils savent qu’ils risquent d’être orientés vers la cité scolaire dont ils ne veulent absolument pas et dont ils avaient réussi à éviter l’affectation jusqu’ici. Les professeurs sont furieux car leur travail n’est pas pris en compte. Les bons résultats de ces dernières années ont fait l’objet d’une diffusion et ils ont suscité de nouvelles demandes d’inscription. Le bouche-à-oreille aidant, les élèves ont conseillé à leur entourage de venir dans leur lycée et une dynamique s’est créée pour voir gonfler les effectifs de ce lycée. Bien entendu ce nombre d’élèves qui se présentaient aux inscriptions correspondaient à des pertes d’élèves pour les deux autres lycées. En juin 2007 le proviseur avait renvoyé sur le lycée du centre-ville 50 dossiers car il ne se voyait pas demander l’autorisation au rectorat de créer des postes alors que la politique est à la suppression d’un maximum de postes... et alors que ce lycée du centre ville aurait dû fermer une classe sinon deux suite à ce manque d’inscriptions. La mesure administrative de renvoyer les lycéens principalement dans le lycée de centre-ville corrigeait cette tendance pour équilibrer les classes et les postes dans chacun des lycées et éviter tout mouvement de personnel. Ces suppression de postes et la fin programmée de la section STG dans ce nouveau lycée touchent donc une équipe pédagogique qui réussit et qui a su nourrir un mouvement favorable d’inscriptions. Les 3 proviseurs le reconnaissent mais ils n’ont pas d’autres solutions pour répondre aux exigences du rectorat en matière d’économies budgétaires. En fait, c’est totalement faux car au niveau de l’académie, il n’y a aucune économie sur la masse salariale et en pratique les proviseurs ont constaté que ce transfert n’allait supprimer aucune classe par rapport à la situation actuelle. Même en bourrant les classes des deux autres lycées, cela ne suffirait pas à absorber l’ensemble des élèves et il y aurait un reliquat qui justifierait l’ouverture d’une classe. Autant maintenir la situation actuelle dans l’immédiat. Il n’y a pas d’économie à court terme dans ce lycée : au niveau de l’académie, la réduction des coûts variables et des charges de personnel n’aura lieu que lors des non remplacements des départs à la retraite. Au niveau des coûts fixes, il y aurait des économies lors de la fermeture et de la vente des bâtiments mais dans quel budget est-on à ce moment là : dans celui du rectorat, dans celui de la région ? Une véritable économie immédiate sur la masse salariale passe par le licenciement des professeurs ou leur démission. Est-ce cela que le Ministère et le rectorat cherchent ? L’argument du manque de classe de BTS est aussi fallacieux. Avant 1991, les bâtiments au centre ville étaient trop petits. Après 1991, la Région et le rectorat interdisaient l’ouverture de nouveaux BTS. Seuls les DUT ont vu leur nombre s’accroître. Il est vrai qu’un DUT GACO avec une promotion de 120 à 150 élèves équivaut à 4 ou 5 classes de BTS. Le lycée avait fait bien entendu des demandes d’ouvertures de BTS ou de classes préparatoires ; elles avaient toutes été refusées. Cet argument est un pis aller sinon il démontre une mauvaise foi évidente et le manque de BTS n’est pas non plus un argument qualitatif, bien au contraire. Les excellents résultats de ce lycée y compris en STG sont obtenus sans que la présence de classe de BTS contribue à la motivation des lycéens. C’est l’effet inverse qui joue : justement les élèves, parce qu’ils savent qu’ils devront présenter leurs dossiers dans des lycées et devant des professeurs qu’ils ne connaissent pas, ont intérêt à soigner leurs dossiers et profiter d’une bonne réputation de leur lycée pour se faire accepter dans les études qu’ils souhaitent poursuivre. Et c’est ce qui se passe : ils sont tous admis là où ils postulent et réussissent plutôt bien même en classes préparatoires HEC réservées pour les STG. Sans être méchante langue, nous pourrions dire que l’assurance d’être admis en BTS dans le même lycée avec des professeurs que l’on connaît joue plutôt en faveur de la loi du moindre effort. Or ce n’est pas cette loi du moindre effort que ce gouvernement veut promouvoir ! Ici également nous sommes en contradiction entre le discours officiel et la pratique bureaucratique et politicienne qui cherche à supprimer une section d’enseignement technologique dans ce lycée. En 1995, lors de l’ouverture de la Terminale commerce, la classe comprenait 22 élèves venant du CAP/BEP VAM sur 32 élèves. C’était un groupe très dynamique qui se connaissait depuis plusieurs années et qui était volontaire pour décrocher un bac STT et réussir des études supérieures. Ils ont tous eu leur bac et ont aidé les camarades sortant de seconde qui n’avaient jamais fait de commerce. Plusieurs élèves venant de VAM ont eu la mention Bien ou Assez Bien. L’année suivante, les Bac Pro ont ouvert et ces élèves ne sont plus venus en STT. Nous en reparlerons.

A moyen terme, la réforme du lycée professionnel supprime les CAP-BEP et instaure un bac professionnel en trois ans dont le niveau devrait juste permettre une formation DUT BTS et ensuite pour les meilleurs des licences et maîtrises en voie professionnelle. En 2004 la réforme du bac STG a eu pour but d’élever le niveau des élèves de manière à gommer si possible l’écart de formation entre les STG et les ES (économie sociale) car les bacheliers de ces deux filières se retrouvent durant leurs études supérieures en BTS ou DUT et il était même question de fusionner les STG avec les ES. La réforme va plus loin en unifiant l’ensemble des sections dans un seul bac général comprenant quelques options. A terme, il y aurait donc les lycées d’enseignement général destinés à la poursuite d’études supérieures longues et les lycées professionnels destinés à des formations supérieures courtes sauf pour les meilleurs qui pourraient aller plus loin. Les sections STG vont donc quitter les lycées d’enseignement général pour se dissoudre dans les bacs professionnels en 3 ans. . En réalité la situation est beaucoup plus complexe. La transformation des CAP-BEP et les bacs pros actuels en un nouveau bac pro sur trois ans permet d’économiser une année d’enseignement soient 25 % des professeurs actuels de CAP-BEP et bac PRO. D’ici trois ans la suppression des bacs STG assure le remplissage maximum des classes de bac pro dont l’effectif doit être multiplié par quatre par rapports à aujourd’hui. Une fois de plus, il risque d’y avoir un surplus de professeurs sauf si les départs à la retraite épongent ce surplus. Sur le papier, cette réforme peut trouver une certaine cohérence, encore faut-il lui donner les moyens d’application nécessaires. Ce qui est loin d’être le cas surtout qu’aucun projet national ou académique n’est précisé et que le gouvernement et son administration bureaucratique se lance dans la manœuvre sans aucune concertation avec les personnels concernés mais c’est un trait typique de la bureaucratie et d’une culture du mépris qui cultive nos si mauvaises relations sociales depuis plus d’un siècle. Une fois de plus, la simple remise de ce plan de dotation budgétaire suffit pour déclencher des protestations et des manifestations car dans ce genre de situation, l’expérience montre qu’il est rapidement trop tard et que la bureaucratie utilise constamment la politique du fait accompli.

La suppression de ces deux postes dans ce nouveau lycée correspond à une première application de cette réforme dans le cadre de cette ville. La situation se complique également car le conseil régional depuis un an a du investir pour restaurer la cité scolaire qui avait atteint un état de délabrement significatif. Elle n’était pas non plus câblée pour un réseau informatique . Ces restaurations ne modifient pas la structure des bâtiments et l’aspect visuel de la cité. Bien entendu l’image et l’ambiance ne sont pas en train d’évoluer favorablement et il y a toujours une nette différence de conditions de travail entre les deux premiers lycées et la cité scolaire. Bref les lycéens font tout ce qu’ils peuvent pour ne pas y aller et devinez leur colère quand ils apprennent que cette réforme ne leur laissera plus d’autre choix que de passer 3 ans dans cette cité incontrôlable.
Cette information qui relève de la comptabilité budgétaire indique bien qu’il n’y a eu aucune prise en compte du contexte local, ni du mérite de l’équipe pédagogique ni des souhaits et des réactions des élèves et de leurs parents. Ce cas pourrait se terminer immédiatement et favorablement pour les intéressés si nous étions déjà dans le cadre de la suppression de la carte scolaire et du libre choix des parents pour inscrire leurs enfants là où ils le souhaitent. La réponse est claire, vous l’avez compris : ils souhaitent de plus en plus inscrire leurs enfants dans le dernier lycée construit dans cette ville qui utilise un intranet, a un restaurant scolaire de bon niveau et des équipes pédagogiques exigeantes et fermes, des animations motivantes, des options culturelles et musicales, une section sportive qui comprend régulièrement plusieurs champions de France cadets ou juniors ( garçons et filles ) qui fréquentent aussi les classes de STG. Il est évident que pour le moment le rectorat n’applique pas encore ces nouvelles dispositions et qu’à la limite, il souhaite régler la question tout de suite surtout en faveur du lycée de centre ville . Le calcul est simple : avec une perte de 120 élèves, ce lycée récent va stagner avec un taux de remplissage des 2/3 alors qu’il était rempli au 4/5 quelques années avant d’être au 3/4 actuellement. Mais il est possible de le vider complètement en saturant les deux autres lycées, surtout la cité scolaire qui manque cruellement d’effectifs vu que tous cherchent à l’éviter. La véritable économie se trouve là : récupérer ce bâtiment toujours neuf pour y installer et regrouper d’autres administrations ou le vendre à une entreprise car c’est le seul lycée facilement transformable en ce que l’on veut et à moindre coût. Pour le moment personne ne s’aventure à dresser ce genre de perspective mais elle est dans tous les esprits car c’est la meilleure solution pour réaliser de véritables économies.Il n’est cependant pas dit que cette fermeture d’un des trois lycées soit le seul but car il y a des gisements d’économies bien plus importants : alléger le coût de l’examen du Bac en réduisant les filières actuelles a un très petit nombre, concentrer les élèves dans des classes de plus de 30 élèves pour supprimer des postes d’enseignants, passer le Bac Pro en 3 ans économise une année scolaire et 25% de professeurs, supprimer les formations initiales en BTS pour les remplacer par des BTS en alternance et en apprentissage avec le financement des centres de formations des apprentis et la contribution des employeurs pour la formation continue. Il doit y avoir encore d’autres sources d’économies. Faire la chasse aux économies est une chose, améliorer la qualité du système éducatif une autre car alors ont établit les coûts de non qualité et les coûts d’obtention de la qualité pour éliminer la non qualité réductible. Cette démarche ne peut s’accomplir que dans le cadre de cercles de qualité et d’une démarche de résolution de problème au niveau local. Elle suppose l’élimination des styles de direction autocratique et paternaliste et l’adoption d’un style de direction participatif. Cette démarche aurait pu avoir lieu dans les années 1980 en même temps qu’elle se déroulait dans les grandes entreprises. Lors d’un premier bilan sur les lois Auroux en 1984, nous l’avions dit à la secrétaire d’état en charge de cette question lors d’une réunion de travail de l’ANDCP ( association nationale des directeurs et chefs de personnels ) à Strasbourg. Elle avait refusé sèchement d’envisager cette démarche dans la Fonction Publique. En dix ans le mouvement qualité totale dans les entreprises a économisé 200 milliards de francs chaque année en éliminant la non qualité réductible sur les 300 milliards de non qualité qui existait annuellement au début des années 1980. Aujourd’hui les caisses de l’état sont vides et la dette augmente. Les gouvernements changent et 24 ans plus tard, nous avons toujours la même attitude bureaucratique hautaine et autocratique en face de nous, surtout que les nouveaux recteurs d’académie ont été nommés semble-t-il en fonction de leur aptitude au management autocratique.

La petite information comptable soulève donc beaucoup plus qu’un simple lièvre. Elle remue une situation complexe qui s’explique surtout par son contexte politique et à travers l’histoire politicienne locale.

Le député maire de la ville a été plusieurs fois ministre de l’éducation, de la défense, de l’intérieur dans les gouvernements socialistes et c’est du temps où il était ministre qu’a été construit le nouveau lycée. Il est de notoriété publique au rectorat et parmi les professeurs de l’académie que le nouveau gouvernement de droite estime que la région a été trop favorisée du temps des gouvernements socialistes et que donc elle doit rendre beaucoup plus de postes que les autres régions. Il est évident que les élus de droite ont intérêt à faire en sorte que le maximum de postes supprimées se trouve chez les élus de gauche. C’est autant de sujets de discordes en moins dans leurs circonscriptions électorales. C’est de bonne guerre politicienne ! Le procédé n’est pas nouveau. Strasbourg et l’Alsace se souviennent encore du fameux synchrotron prévu pour le CNRS de Cronenbourg et que Louis Mermaz avait déplacé chez lui à Grenoble après 1981. Chaque région et chaque ville peut présenter des exemples dans cette catégorie peu flatteuse pour notre classe politique. Au-delà des querelles politiciennes, il est évident que cette région rurale et fortement ouvrière dépendante quasiment d’une mono production devait entamer dans les années 1980 son virage vers les emplois du tertiaire et que la multiplication des formations tertiaires était une priorité. Cela passait bien entendu par la construction de nouveaux lycées. De même, l’ancien député maire ministre a très bien pu estimer qu’il fallait construire un nouveau lycée en remplacement de l’ancien lycée de jeunes filles devenues trop étroit au centre-ville et que les moyens supplémentaires mis dans ce nouveau lycée allaient servir à remplacer en totalité ou en partie l’ancienne cité scolaire qu’il suffisait alors de laisser vieillir à son terme pour la raser et utiliser cette importante réserve foncière soit pour des projets scolaires soit pour des habitations. Or c’est une présidence de région socialiste qui sans concertation aucune sur un plan de développement des lycées de la ville, a pris l’initiative de rénover la citée scolaire de fond en comble sans pouvoir en changer la structure car cela aurait coûter bien trop chère. En 1991 la région gérait déjà les lycées mais comme c’est toujours l’état qui gère les professeurs, l’état peut donc vider des lycées sans que la région n’y trouve à redire. Constatant que le lycée est vide, la région n’aurait plus qu’à revendre les bâtiments. Transférer des élèves d’un lycée à l’autre avec leurs professeurs ne représente aucune économie sur la masse salariale. La suppression de professeurs est prévue lors de leur départ à la retraite et vider partiellement un lycée ne constitue qu’une augmentation du coût unitaire de pension ou de logement à la charge de la région. Il est effectivement difficile de trouver de réelles économies dans l’immédiat pour le budget de l’état sauf s’il ferme des établissements scolaires et supprime ces coûts fixes. A force de supprimer des postes et de regrouper les élèves dans des classes surchargées, on finit très vite à devoir payer des professeurs à ne rien faire ou à ne pas faire cours. Sauf s’il y a un projet audacieux de généraliser la rupture à l’amiable du contrat de travail à la fonction publique. Certains doivent en rêver chaque nuit !Pour le moment la solution est aussi simple qu’archaïque : il vaut mieux fermer des classes et regrouper des élèves quitte à laisser quelques professeurs dans leurs postes sans classes et les inviter à ranger les bouquins du CDI. Comme mépris pour les enseignants, il est difficile de mieux faire sans parler du gaspillage des ressources humaines mais une bureaucratie n’est pas capable de comptabiliser ces coûts et elle a le réflexe séculaire de les ignorer. Nous avons évaluer à partie d’une enquête dans les entreprises allemandes en 1996, le coût de la peur au travail et des mauvaises relations sociales : il y a de quoi combler tous les déficits publics en une année mais le coût d’obtention de cette qualité est connue et tabou : c’est le coût de l’élimination du paternalisme dans les entreprises familiales et de l’élimination de la bureaucratie dans les administrations, les entreprises, les associations. Bref il s’agit d’un changement radical de culture : de valeurs, de règles d’organisation et de modes de vie. Supprimer des postes pour réaliser des économies est alors mesquin et hypocrite tant que les causes des dysfonctionnements actuels ne sont pas traitées. En clair, ces manoeuvres ne serviront à rien sauf à agacer une fois de plus les gens devant le manque de lucidité et de courage de nos dirigeants politiques.

Nous sommes donc ici en présence d’un exemple patent où le changement d’hommes politiques a pour conséquence des changements de politique qui mène à des aberrations économiques et des incohérences entre les décisions prises par le conseil régional, le rectorat d’académie et la ville. Ce contexte fournit des arguments de premier ordre aux professeurs et aux élèves : avant de chercher à faire des économies en supprimant des postes, il faut commencer par évaluer le coût de toutes ses erreurs et de ses gaspillages d’argent public et d’en condamner les responsables. Il est évident que 2 lycées suffisent pour la ville du fait de l’arrivée des classes d’âge creuse mais fallait-il restaurer l’intérieur des bâtiments d’une cité scolaire HLM alors que deux lycées n’étaient pas au complet et qu’il suffisait de passer des accords avec les entreprises locales pour utiliser d’anciens ateliers désaffectés comme centre de formation. Depuis ces industriels ont vendu leurs bâtiments ou leurs terrains a des supermarchés ou hypermarchés. Cette situation complexe et chargée d’éléments politiques peut le cas échéant être utilisée par le gouvernement dans le cadre d’une revanche politique pour ennuyer les dirigeants socialistes de la région. Mais les professeurs et les élèves doivent-ils faire les frais de telles absurdités politiciennes ? Evidemment non !

Ces mesures particulièrement incohérentes peuvent aussi s’expliquer par le changement radical de politique scolaire et l’abandon du plan éducation 2000 et l’abandon de la volonté de mener 80 % d’une classe d’âge au niveau bac. Nous rappelons que l’étude de 1986 au Japon a démontré que la population active japonaise avait à 93 % un niveau de qualification égale ou supérieure à bac+2. Nous étions à l’époque entre 45 et 48 % et nous ne savions toujours pas utiliser correctement les robots et les automates programmables. Cette réforme actuelle s’inspire visiblement du modèle allemand. Dans ce pays, deux tiers d’une classe d’âge suit la formation DUALE, c’est-à-dire professionnelle, et un tiers d’une classe d’âge passe l’Abitur pour entreprendre des études supérieures longues au-delà de bac+4. Or il se trouve qu’en France nous n’avons pas du tout la culture germanique qui explique cette réussite de l’apprentissage. Nous rappelons brièvement qu’en Allemagne les centres de formation sont intégrés aux grands groupes industriels qui financent aussi des instituts universitaires. Après 50 ans, la plupart des techniciens et cadres s’occupent de former les jeunes ( sans avoir à passer le concours d’entrée de l’éducation nationale ). Grâce aux amortissements sur deux ans, régulièrement du matériel de trois à quatre ans d’âge est installé dans ces centres de formation, ce qui garantit aux élèves des équipements de haut niveau tout à fait récents. Bien entendu le financement de ces centres de formation sur le plan comptable est réduit : la valeur comptable d’un bien amorti est égale à zéro. En clair, il s’agit plus d’une dotation, d’une donation de l’usine à son centre de formation. Et à la fin de l’apprentissage, il va sans dire que l’effort est fait pour embaucher directement les jeunes. Cette voie professionnelle en Allemagne est également valorisée par le fait que 66 % des entreprises allemandes sont dirigés par d’anciens cadres et qu’il y a donc un rôle important de la promotion interne dans la gestion des ressources humaines. Un diplômé de la formation duale peut réussir à devenir le dirigeant de l’exécutif de l’entreprise, la famille des actionnaires étant à ses côtés. Nous rappelons également qu’en Allemagne, les représentants des salariés ont un droit de vote comme les actionnaires pour participer à la codétermination des politiques de leurs entreprises. Tout ceci n’existe pas en France, certains ministres sont morts mystérieusement pour vouloir faire voter le droit de vote des salariés lors des assemblées générales des actionnaires. Nos très mauvaises relations sociales depuis plus d’un siècle s’expliquent par la persistance du paternalisme dans les entreprises familiales et la généralisation de la bureaucratie. Le monopole de l’éducation nationale est un échec dans la voie professionnelle car il n’est guère possible de financer directement à travers les impôts des équipements lourds pour les centres d’apprentissage. En France il n’y a que 21 % d’entreprises dirigées par d’anciens cadres et les conflits incessants entre employeurs et salariés détournent des générations d’élèves des entreprises. Les formations professionnelles n’ont pas été valorisées par l’éducation nationale car le système de sélection envoie des élèves en difficulté, démotivés ou turbulents afin de ne pas déranger la progression des meilleurs qui vont concourir à trouver une place parmi les élites. Récemment cette phrase rapportée par une caissière de supermarché est devenue célèbre : si tu n’apprends pas bien à l’école tu finiras comme caissière, en l’espèce dans les hypermarchés Leclerc. Ce n’est pas faux mais cette réalité doit-elle servir d’axe de développement pour une réforme de l’institution scolaire ? Cette concentration des moyens dans des lycées professionnels sans modifier la culture et supprimer le paternalisme et la bureaucratie, ne va pas améliorer la situation car les racines, les causes du malaise ne sont absolument pas traitées. Plutôt que de les traiter, le recours à de la main-d’oeuvre étrangère beaucoup moins chère et plus docile est envisagé une fois de plus. Comme la plupart des BTS sont déjà embauchés au SMIC, il n’y a pas non plus d’économie pour les entreprises en pensant embaucher à leur place des Bac Pro qui devront être eux aussi payés au SMIC. Par contre, il y des économies pour les entreprises et l’Education Nationale dans le fait de généraliser la formation après le bac sous forme de contrats d’apprentissage et de BTS par alternance. Pour obtenir ces économies, il faut en effet commencer par développer un maximum de Bac Pro. Est-ce que cette réforme correspond aux souhaits d’orientation et de réussite des parents pour leurs enfants ? C’est toujours une question politique ! C’est à un nouveau un CIP déguisé. Rien n’a changé, ils recommencent !En clair, nous sommes de nouveau face à un CIP déguisé tant que les entreprises utilisent un groupe d’apprentis qui changent chaque année et n’est jamais embauché. Rien n’a changé, ils recommencent ! Les élèves l’ont déjà compris et parcourent les rues de la ville.

La question est pourtant simple : la république doit elle favoriser pour tous l’acquisition d’un niveau de qualification égale ou supérieur à bac +2 ou bac +3 qui est le niveau européen d’employabilité décidé à Lisbonne par les membres de l’Union ou bien alors le système éducatif ne doit-il assurer qu’un niveau minimum qui sera compléter en fonction des situations personnelles par les employeurs, par un travail individuel d’autodidacte ou un travail de groupe dans des associations ? En beaucoup plus clair : faut-il permettre aux jeunes d’avoir de bon diplômes pour obtenir un bon emploi et être bien payé ou alors faut-il prendre en compte la situation de l’emploi et les volontés des employeurs paternalistes qui tiennent à avoir de la main d’oeuvre qui ne coûte pas cher et qu’ils peuvent plus ou moins former à leur guise ? Un jeune diplômé refuse le SMIC et de plus en plus préfère partir travailler à l’étranger où les entreprises prennent davantage en compte les mérites individuelles qu’en France. Le manque d’argent de l’état doit-il nous imposer des formations initiales au rabais parce que le reste sera le cas échéant pris en charge par les entreprises ? Les filiales étrangères situées en France attirent les meilleurs car elles paient correctement, forment et assurent une promotion interne : toutes sont dirigées par d’anciens cadres. Il n’en va pas de même dans les entreprises familiales paternalistes représentées principalement par l’UIMM. En se pliant aux volontés de l’UIMM et en réduisant le niveau de qualification pour permettre des salaires d’embauches encore plus nombreux au SMIC et des périodes d’apprentissage avec du travail payé moins cher que le Smic ( de 25 à 75% du Smic ), l’état occulte totalement le fait que les entreprises étrangères recrutent à un haut niveau de qualification et ce sont elles qui créent le plus d’emplois qualifiés. D’autre part, il est évident que dans le domaine industriel, un niveau bac peut suffire sur certaines machines. Dans le tertiaire, ce n’est pas pareil, depuis plus de vingt ans l’essentiel des recrutements se fait à Bac +2 car il faut être davantage polyvalent en gestion, communication, mercatique, bureautique, etc.... même pour le commerce en ligne sur le Net. Mais il est évident que la commerçante d’un petit commerce va préférer un niveau d’étude plus faible que le sien de manière à assurer sa direction paternaliste.

En dehors de ces considérations politiques et démographiques, la concentration des bac pro dans un seul lycée professionnel n’est pas forcément une bonne opération.

Pour le moment ce sont les sections de technologie avec leur financement apporté par la taxe d’apprentissage qui ont permis aux lycées généraux de se doter plus facilement de salles informatiques et de matériels utilisés aussi par les autres sections, notamment la section S qui commence à utiliser l’outil informatique en cours. Cette taxe d’apprentissage va-t-elle disparaître dans les lycées généraux ou est-ce un prochain cadeau fiscal pour les entreprises que de la voir supprimer purement et simplement ? Les élèves affectés en Première STG malgré leur souhait d’aller en Première ES pouvaient se re motiver en comparant chaque jour ce qu’ils faisaient en cours avec leurs camarades d’ES et en STG, ils peuvent constater que leur programme a quasiment le même niveau d’exigence, qu’ils ne suivent donc pas une formation au rabais et qu’après le bac, lorsqu’ils se retrouveront en BTS ou DUT, ils n’auront pas beaucoup de retard ou d’handicap. Dans un lycée professionnel, cette situation aura disparu. La séparation se fera dès la fin de troisième et du collège alors que les problèmes des collèges ne sont pas réglés. Actuellement les élèves de STG disent que leurs camarades en bac Pro ne font pas grand chose et que leurs professeurs ne peuvent pas leur apprendre grand chose car ils n’ont pas les bases nécessaires. La plupart des élèves de STG sont des élèves de seconde ayant pris l’option Economie Sociale et dont le niveau en maths et français a été jugé insuffisant pour une première ES mais ils ont un niveau supérieur à celui des Bac Pro. Les BTS sont de plus en plus remplis par des bac Pro et la moitié d’entre eux échouent vu leur faible niveau. Avant les Bac Pro, la plupart des CAP et BEP venaient en première d’adaptation en STT et ils réussissaient tous leur bac et faisaient avec succès des BTS et DUT. Depuis l’ouverture des Bac PRO, les classes d’adaptation ont été supprimées car ils n’y avaient plus beaucoup d’élèves et souvent c’étaient des élèves qui étaient refusés en Bac Pro et que l’inspection d’académie plaçait d’office en première STT. Ce système scolaire a le plus souvent fonctionner à l’envers, à défaut en ne prenant en compte que les échecs scolaires sans s’attaquer réellement aux causes de ces échecs. A chaque fois, le système a baissé le niveau de ses exigences et à chaque fois cela a entraîné des perturbations dans les classes dans lesquels finalement se sont retrouvés ces élèves. Aujourd’hui, les élèves de STG cherchent avant tout des DUT car les BTS sont « pourris » par les bac Pro. Au départ les bac Pro devaient trouver du travail et seuls les meilleurs devaient être admis sur dossier dans l’enseignement supérieur. Comme nous sommes toujours depuis vingt ans champion d’Europe du chômage des jeunes, bien entendu ils n’ont pas trouvé d’emplois d’où cette solution forcée de poursuivre des études pour lesquelles ils sont mal préparés rien que sur le plan de la discipline et de l’attitude en cours. En DUT, la plupart sont incapable de suivre un cours magistral en amphithéâtre et de prendre des notes. Les professeurs n’ont pas été sollicités pour résoudre ces dysfonctionnements. L’alliance entre le Ministère et l’UIMM favorise le maintien du paternalisme et offre aux employeurs de nouveaux apprentis pour assurer à faible coût des travaux de production. Le gouvernement ne travaille pas à l’élimination du paternalisme et de la bureaucratie. Face à ce système en pleine décrépitude, nos dirigeants politiques préfèrent refiler le problème aux employeurs sans mettre en place un véritable projet de valorisation des compétences professionnelles. Comme ils ont bradé la sidérurgie, les mines, des pans entiers de notre économie, comme ils ont faillé vendre pour un euro Thomson à Daewoo, comme Th Breton a refusé d’investir dans les écrans LCD, comme tant d’autres gaspillages et erreurs qui pèsent sur notre croissance, ils en ont marre de gérer le système scolaire et reviennent à la case départ de la 3ème République. Les économies ont bon dos : dans les entreprises, la qualité a été améliorée tout en réalisant la suppression des gaspillages et des dysfonctionnements grâce aux cercles de qualité et au management participatif.Au niveau des gaspillages dans la formation professionnelle, nous n’utilisons ici qu’un seul exemple bien connu : la mine d’or qu’ont représenté pour les entreprises les contrats d’adaptation et de qualification dans les années 1980. Personnellement nous l’avions fait après quelques années aussi pour les jeunes ingénieurs et cela rapportait gros. Nos discours étaient rodés et même ce jeune diplômé de Centrale Lyon a finalement signé son avenant au contrat de travail et nous en avions pris pour 12 mois. Au bout d’un an, il était venu nous revoir d’un air sarcastique pour savoir si nous avions bien touché tout l’argent qu’il nous avait rapporté. Et durant ces années, nos directions et nos comptables avaient modifié leur langage envers le service du Personnel : nous n’étions plus les gestionnaires des coûts les plus importants dans l’entreprise mais nous pouvions aussi rapporter de l’argent... et pas mal d’argent car nous embauchions aussi beaucoup ! Passons par décence sur le contenu de l’annexe qui présentait les mesures de formation individuelles et qui étaient envoyées à la Direction régionale du Travail. Il n’y a jamais eu le moindre contrôle. Il est logique qu’après toutes ces années d’argent facile et de gabegie, il n’y ait plus de sous dans les caisses de l’état et que la seule solution qui reste pour accorder des avantages aux entreprises consiste à leur permettre de multiplier les formations en apprentissage qui, principalement dans les nombreuses entreprises paternalistes, ont des annexes de formation individuelle aussi creuses que les nôtres à l’époque des contrats de qualification. Nous en rigolions alors dans nos grandes entreprises, eux visiblement prennent toujours ceci très au sérieux sans craindre le ridicule. Une réforme de la formation professionnelle doit donner au pays la garantie que ces pratiques seront éliminées. Nous nous répétons volontiers, cela passe par l’éradication du paternalisme et de la bureaucratie et les lois qu’il s’agit de mettre en place sont connues depuis au moins 1945 : favoriser sur le plan fiscal la transmission des entreprises familiales à un ou plusieurs cadres non actionnaires au départ, favoriser la promotion interne aux postes de dirigeants comme en Allemagne ou dans les autres pays industriels, organiser le vote des représentants du personnel à l’assemblée générale des actionnaires comme en Allemagne et dans d’autres pays voisins, organiser l’apprentissage au travail coopératif et au management participatif à l’école, dans les lycées et l’enseignement supérieur ( ceci est bien plus concret et source de valeur ajoutée pour le groupe et source d’enrichissement personnel pour l’élève que les théories pédagogiques fumeuses sur l’élève acteur de la construction de son savoir...). Les réformes de l’éducation nationale ne fonctionnent pas parce qu’elles ne servent pas à préparer notre jeunesse à éliminer les causes du manque de dynamisme de l’économie française, au contraire elles l’endorme dans le conformisme académique, des savoirs qui ne sont que des instruments de sélection sociale et elles ne lui transmettent que des valeurs d’obéissance et de soumission dont ont besoin les dirigeants de nos systèmes de pouvoir. Ce n’est même pas mettre la charrue avant les boeufs, c’est continuer à biner à la main car pour payer le coût d’entretien du château, l’achat d’une charrue et d’une paire de boeufs n’est même pas envisagé par le propriétaire du château !

Nous avons vu les préoccupations des uns et des autres dans cette réforme et ses conséquences. Il nous reste à présenter un dernier problème majeur dans la mise en place de cette réforme : le sort des professeurs dont le poste est transféré d’un lycée à l’autre. Les professeurs concernés par la suppression de postes savent qu’ils ne peuvent pas compter sur une mobilité interne et une gestion prévisionnelle des effectifs. La pratique bureaucratique est purement comptable : un poste supprimé signifie que son titulaire est affecté en équipe d’appuis pour assurer les remplacements. Il perd son poste fixe et peut donc se voir signifier du jour au lendemain d’aller dans tel ou tel établissement assurer tels et tels cours. Ces conditions de travail particulièrement difficiles sont d’ordinaire attribuées aux jeunes professeurs débutants ou à des volontaires qui cherchent ainsi à obtenir davantage de points dans la perspective d’obtenir plus favorablement une mutation. Au bout de quelques années de statut TZR (titulaire de zone de remplacement), ces professeurs ont enfin poste fixe et peuvent s’intégrer pleinement dans la vie de leur établissement. Ces dernières années, à la suite de toutes ces suppressions de postes et face à la quasi-disparition des créations de postes, les nouveaux arrivants doivent patienter de nombreuses années. Pour le moment où il semble que cette pratique bureaucratique archaïque de gestion de personnel doive s’appliquer à cette vaste restructuration des lycées et par voie de conséquence que tous les professeurs de STG qui vont quitter leurs lycées d’enseignement général et technologique pour rejoindre un lycée professionnel vont passer par ce statut de TZR. Ce manque d’information exaspère la colère de nos professeurs qui souvent après plus de 10 ans de carrière en poste fixe vont se retrouver TZR et passer par la case départ avec toutes les conditions de travail mauvaises que cela comporte. Pour un développement de carrière et une prise en considération du mérite et de la valeur du travail, c’est totalement l’inverse qui se produit. Le changement d’une écriture de comptabilité budgétaire ou analytique n’a absolument pas besoin de s’accompagner d’un changement de statut aussi révoltant et injuste ! Surtout qu’il n’y a aucune économie sur la masse salariale.

L’application de cette réforme des formations professionnelles est le moment ou jamais de mettre enfin dans l’Education Nationale une mobilité interne et une gestion prévisionnelle réelle des effectifs et que les services du rectorat arrêtent leur gestion au jour le jour qui transforment des êtres humains en pions que l’on déplace parfois contre toute logique et en dépit du bon sens ! Pour le moment et jusqu’en 2009 environ, les départs en retraite ont été différés à cause de l’allongement de la durée des cotisations à 40 ans. Les départs nombreux vont donc reprendre vers 2010. Poursuivre la suppression massive des postes d’enseignants représente donc manifestement un excès de zèle bureaucratique sans aucun fondement car il n’y a aucune économie sur les frais de personnel. Ces mesures sont ressenties comme une chasse aux enseignants et aux fonctionnaires et elles illustrent la culture du mépris et de l’arrogance affichée par ces nouveaux princes qui nous gouvernent sans pudeur et sans gêne dans l’attirance qu’ils ont de l’argent et du vedettariat. Ce mépris est largement ressenti par les enseignants dont les postes sont supprimés de cette manière et par les élèves et leurs parents... ainsi que par nos trois proviseurs semble-t-il.

Le cas de cette ville et de ce lycée n’est pas isolé. Nous l’avons retenu parce qu’il met en place pratiquement tous les ingrédients d’une faillite politique économique et sociale : la contradiction dans les mesures politiques, les querelles politiciennes locales et nationales, l’application absurde d’une bureaucratie comptable, le manque de communication, l’absence totale de projets qui pourraient servir de négociation et d’adhésion, le manque d’analyse du contexte local, le mépris qui est ressenti par les personnes touchées par ces mesures administratives. Le proviseur du lycée peut se plaindre de ne pas avoir de réponse de la part du rectorat, personne ne veut se mouiller et tout le monde fait l’abonné absent. Nous sommes bien en face de décisions purement politiques. Ces suppressions de postes n’entraîneront aucune économie. Ainsi va la mise en place des réformes dans notre pays. Une fois de plus cette mise en place soulève révolte et dégrade plus encore les mauvaises relations sociales entre employeurs et salariés. Pour résoudre ce cas, notre mouvement fileane.com soutient la démarche suivante.

Refuser en l’état actuel la suppression des postes. Exiger le transfert des postes fixes entre l’ancien et le nouveau lycée et connaître cette mutation dès la fin de l’année scolaire et pas début septembre. Ce qui n’a aucune incidence sur la masse salariale mais évite la dégradation des conditions de travail provoqué par le statut de TZR. L’argument repose sur le fait qu’il ne s’agit plus d’une adaptation des effectifs au nombre d’élèves mais d’un regroupement d’élèves dans un seul lycée. Cette nouveauté de la réforme doit s’accompagner d’un changement dans la pratique bureaucratique de la gestion des effectifs. Une réponse négative signifie une prise de responsabilité directe dans l’explosion qui va suivre et ce pourrissement ne peut avoir, à notre avis, qu’un but politique : confier la gestion des personnels enseignants aux régions et ne plus en avoir la charge lorsque l’on est au gouvernement. De toute manière si le rectorat refuse autocratiquement de modifier sa gestion bureaucratique des effectifs et de mettre en place une véritable mobilité interne digne de l’année 2008, les enseignants devront bien se tourner vers les régions pour débloquer la situation. Mais pratiquer la politique du pire est en principe sanctionné par l’éviction immédiate des coupables. Nous ne devrions pas en arriver là mais rien aujourd’hui n’en donne l’assurance. Cette garantie doit être donner rapidement : elle ne coûte aucun euro, nous insistons !

Mettre en place une démarche de résolution de problèmes et d’amélioration de la qualité sur le plan local au niveau de la ville afin de définir la solution optimale pour savoir quels lycées regrouperont l’ensemble des classes. S’il n’y a pas suppression à terme d’un lycée, ce transfert et cette suppression de postes n’ont aucun intérêt sur le plan des économies. Ce n’est alors qu’une mesure politique partisane parfaitement détestable. Cette démarche participative rassemble l’ensemble des partenaires de la communauté éducative. Elle peut avoir lieu sous la gouverne de la région, de la mairie ou dans le cas d’un refus des pouvoirs publics, dans le cadre d’une coordination autonome. Cette démarche se déroule dans le cadre du principe de subsidiarité et d’une démocratie locale participative. Cette démarche garantit l’obtention de réelles économies, elle assure une re motivation des acteurs et le changement des pratiques bureaucratiques par l’introduction d’une réelle gestion des ressources humaines au sein de l’éducation nationale du moins dans l’académie ou ce bassin d’emploi. Il s’agit d’un changement culturel et d’un changement des attitudes en profondeur.

Enfin porter sur la place publique la question de l’utilité de cette nouvelle réforme qui ne traite absolument pas les causes du manque de dynamisme de notre économie et donc est soit très démotivante soit inutile. Changer la structure de la formation secondaire et des lycées ne résout rien : les gisements d’économies existent dans l’Education Nationale comme partout ailleurs et il est grand temps d’engager une démarche de qualité avec l’ensemble des acteurs du système scolaire. Par contre l’état doit éliminer le paternalisme et la bureaucratie et commencer par faire voter les lois qui sont nécessaires. Ensemble, écoles et entreprises sont capables d’assurer le développement durable du pays. Toutes les deux doivent commencer rapidement leurs réformes : ne réformer que l’école alors que le management archaïque et les très mauvaises relations sociales continuent, c’est montrer un très mauvais exemple à notre jeunesse et continuer à la détourner des entreprises. L’école doit préparer une jeunesse à comprendre les réussites et les échecs de la vie professionnelle, économique, politique et sociale sans oublier la vie tout court : amoureuse, spirituelle, artistique, biologique et la santé et elle doit pouvoir lui donner les moyens d’accomplir à l’âge adulte de nouveaux progrès, de nouvelles économies et de nouvelles richesses. Mais ici nous sommes déjà passé davantage du côté de l’alternative de l’organisation en réseau tant il nous semble que ces objectifs n’appartiennent plus aux volontés des dirigeants de nos systèmes de pouvoir.

Ces mesures ne coûtent rien de plus qu’un peu de communication interne et un certain bon sens dans la prise en considération des carrières des personnels. Mais c’est ce qui manque le plus depuis plus d’un siècle ! La comptabilité n’est pas le summum du management. Elle doit passer après la gestion des ressources humaines et la mobilité interne. Personnellement nous avons mis en place une mobilité interne et une gestion prévisionnelle des effectifs dans toutes les entreprises où nous étions après 1985. Et notre comptable a toujours pu imputer les effectifs dans les centres de coûts directs et indirects et nous faisions aussi des prévisions budgétaires annuelles avec une marge de dépassement inférieure à 2% ( ce qui était la norme admise dans cette société multinationale américaine et que nous avons continué à appliquer ensuite dans les entreprises françaises où nous avons travaillé ).

Il est évident que ce gouvernement veut échapper rapidement à tous les problèmes de fond qui grèvent le bon fonctionnement du système scolaire, en particulier la persistance d’un illettrisme plus ou moins grand chez les élèves et la montée des incivilités, des comportements déviants qui empêchent de faire cours. Ces réformes sont un retour en arrière, un renforcement de l’élitisme, un abandon de la formation professionnelle : les employeurs vont récupérer des bacheliers généralistes qu’ils formeront en fonction de leurs besoins. Ceci comme dans le passé va renforcer la dépendance du salarié vis à vis de l’employeur car cette formation spécifique sera difficilement transposable sur le marché de l’emploi vers d’autres entreprises. C’est une prime accordée par l’état au maintien du paternalisme et de la bureaucratie...Les économies vont se faire sur le dos des étudiants et de leur famille et ce n’est pas la fraction du Smic versée dans le contrat d’apprentissage qui pourra compenser la baisse du niveau de qualification générale car actuellement, les risques sont importants que l’étudiant ne rencontre pas une entreprise qui s’occupe véritablement de sa formation sur le terrain mais le laisse à des tâches de manutention ou de simple exécution. Il n’existe pas en France des centres d’apprentissage bien équipés pilotés par les entreprises, surtout pas dans les très petites entreprises ou commerces de distribution qui sont les grandes consommatrices de BTS par alternance. Cette lacune criante sera-t-elle enfin comblée ?

En conclusion, le cas de ce lycée que nous présentons, est en totale opposition avec le discours tenu par le chef de l’état : il n’y a pas reconnaissance du mérite du travail accompli et il n’y a pas une prise en compte du souhait des parents d’élèves. Pour satisfaire les exigences du chef de l’état, la bureaucratie commet des excès de zèle en précipitant les suppression de postes alors qu’il n’y a pas encore de départs en retraite du fait de la loi sur le passage à 40 ans dans la fonction publique. Le manque de communication et la politique du fait accompli développent une fois de plus le mépris des dirigeants politiques envers les fonctionnaires de base. L’incurie administrative dans l’éducation nationale qui ne met toujours pas en place une mobilité interne et une gestion prévisionnelle des effectifs autre que son lourd système de mutation totalement inapproprié face à la vague de transferts de postes que contient cette réforme de l’enseignement professionnel, est aussi une attitude de dédain et de mépris injustifiable que les seules préoccupations comptables ne peuvent justifiés. Prétendre supprimer des postes alors que les enseignants font toujours partie de la masse salariale ne représente en rien une économie financière. Accorder la priorité à ces calculs comptables par rapport à une gestion des ressources humaines illustre bien la domination de la bureaucratie dans notre système de pouvoir au service des élites dirigeantes. Nous allons mettre fin à ces archaïsmes stupides et révoltants qui réduisent à néant la motivation des personnels et entretiennent une soumission malsaine à une culture déshumanisée et autocratique.

Dans le cas d’un mutisme avéré des pouvoirs publics et de l’administration de tutelle et face à un passage en force des pratiques archaïques qui ont fait tant de dégâts dans le passé, fileane.com participera à l’organisation d’une désobéissance civile pour arriver à l’abandon de ces pratiques détestables dans cette ville et ailleurs dans le pays. Nous allons débuter notre sixième année de présence sur le net, il est temps de mettre en pratique nos écrits même si ce travail d’écriture n’est pas totalement achevé. Il y a urgence. Nous n’allons pas jouer une fois de plus ici au professeur mais les propos de notre professeur de droit constitutionnel en première année sont toujours présents dans notre esprit : Avant 1789, lorsque les caisses du royaume étaient vides, le roi avait l’obligation de réunir les états-généraux. Ce fut une manière paisible d’introduire la révolution de 1789. Depuis 1789, cette obligation n’existe plus et toutes les constitutions ont été mises en place à la suite de guerres civiles ou militaires ou de troubles civils. La constitution de 1958 n’échappe pas à cette règle et comme elle est particulièrement bien verrouillée par l’article 16, pour renverser ses dirigeants, c’est encore plus difficile qu’avant. Mais ce n’est pas impossible même si nous ne pouvons plus entonner avec nos élèves le chant du départ en hurlant " tyrans descendez aux cercueils !" car ils sont capables de nous prouver qu’ils sont couverts par cet article 16 et ne sont donc pas des tyrans...tout comme il n’existe aucun risque de tyrannie financière ! Les caisses de l’état sont vides, le monde entier le sait, nous pouvons pour le mois de mai 2008, en fêtant l’anniversaire de mai 1968, organiser le déroulement de ces états-généraux afin de changer de régime politique. Préparons ce mouvement et si mai 68 a été un mouvement spontané et imprévu, ce qui explique largement le changement des modes de vie mais aussi l’absence de changement dans les normes sociales et le fonctionnement des institutions, ne commettons plus cette erreur. Prévoyons, organisons pour éliminer la bureaucratie et le paternalisme. Les filiales étrangères travaillant en France ont depuis longtemps supprimé ces deux fléaux séculaires. Ce n’est pas difficile et ceci explique aussi l’attirance des entreprises étrangères pour la France : il suffit d’introduire leur management coopératif pour aussitôt apporter un progrès social dans les relations de travail. Pour elles, c’est du gâteau ( excepté pour les fonds d’investissements qui cherchent avec leur LBO à utiliser nos entreprises comme pompe à super bénéfices ). Nous voulons nous attaquer aux causes profondes du malaise français. Cela commence à l’école ! Qui veut nous le reprocher ?

Messages

Un message, un commentaire ?

Forum sur abonnement

Pour participer à ce forum, vous devez vous enregistrer au préalable. Merci d'indiquer ci-dessous l'identifiant personnel qui vous a été fourni. Si vous n'êtes pas enregistré, vous devez vous inscrire.

Connexions'inscriremot de passe oublié ?