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LOPPSI 2 ou l’irrésistible ascension de l’Etat surveillant

mercredi 19 janvier 2011

Aujourd’hui le Sénat entame la deuxième lecture de la LOPPSI 2.
Le CECIL (Centre d’Etudes sur la Citoyenneté, l’Informatisation et les
Libertés) vous propose une analyse du projet de loi.

Vous trouverez ci-dessous un court texte de présentation et en attaché
le même complété d’une analyse détaillée (Avec le .pdf vous devriez
pouvoir accéder aux URLs des sites cités qui ont tendance à disparaître
dans les courriels).

+ d’info : www.lececil.org

Le CECIL 18 Janvier 2011


LOPPSI 2 ou l’irrésistible ascension de l’Etat surveillant

La LOPPSI 2 (Loi d’Orientation et de Programmation pour la Performance de
la Sécurité Intérieure) vient d’occuper les débats à l’Assemblée
Nationale. Ce projet de loi définissant les objectifs prioritaires du
gouvernement de 2009 à 2013 en matière de lutte contre « l’insécurité »,
arrive au terme de son parcours législatif, et il laisse augurer de
sombres heures pour les libertés publiques.
Après avoir été examiné en deuxième lecture par les députés, du 14 au 21
décembre 2010, le texte repassera devant les sénateurs à partir du 18
janvier 2011. Les députés l’avaient déjà adopté en première lecture. Quant
aux sénateurs, ils l’ont de prime abord rejeté en raison de certains
amendements [1] procédant, selon une majorité d’entre eux, d’une « 
surenchère sécuritaire », avant de l’adopter finalement en septembre 2010.

Le triptyque fichage / surveillance / enfermement
Sorte de fourre-tout législatif cumulant des mesures pour beaucoup d’entre
elles annoncées suite à des faits divers médiatisés, la LOPPSI 2 prétend
offrir aux français "la sécurité partout, pour tous" et « renforcer (
) la
tranquillité nationale ». Ce qu’elle offre surtout, c’est un pouvoir
incommensurable à la police et à la justice, mettant en péril les
équilibres démocratiques de notre société au nom de la lutte contre une
série de fléaux hétéroclites et curieusement amalgamés, parmi lesquels "la
délinquance" (mais pas la délinquance financière), "la cybercriminalité",
"l’insécurité routière", "la pédopornographie"...
A l’instar de la LOPSI 1, votée en 2002 et consolidée en 2004, qui avait
suscité de nombreuses critiques de la part d’associations et de collectifs
militants (IRIS, Attac...), de la part de syndicats et de partis
politiques, mais également de la CNIL ou de la CNCDH, la LOPPSI 2 est
présentée comme "un dispositif d’exception pour un sujet d’exception",
arguant d’une menace terroriste ou relevant de la" criminalité organisée"
d’exceptionnelle ampleur. Comme le souligne le Syndicat de la
Magistrature, la LOPPSI 2 est « un texte dont la philosophie générale vise
à étendre les formules de fichage de la population et à créer ou aggraver
des infractions dans divers domaines » et qui, « en dressant la liste
exhaustive des prétendues menaces intérieures et extérieures, révèle une
conception de la société à la limite de la paranoïa. Il en résulte un
aggloméré de mesures sans liens particuliers entre elles, visant tantôt à
créer de nouvelles incriminations ou à aggraver les anciennes, tantôt à
permettre à l’Etat d’instituer un régime d’impunité pour ses agents de
renseignements ou de mieux avoir à l’œil des populations ciblées. ».
Portée par une idéologie sécuritaire et punitive, la LOPPSI 2 consacre
l’objectif de toujours plus "surveiller et punir" en recourant, d’une part
à des technologies de l’information et de la communication automatisant la
détection des "déviances" et systématisant le recoupement des informations
stockées (dispositifs de vidéosurveillance réputée de plus en plus
"intelligente", de géolocalisation, d’identification, d’interception et
d’enregistrement des communications, fichiers "partagés", logiciels
"d’analyse sérielle"
) et d’autre part à des dispositions législatives
plus répressives, criminalisant certaines pratiques et stigmatisant
certains groupes sociaux en particulier. La LOPPSI 2 s’attaque ainsi à la
vente à la sauvette, à l’habitat nomade/précaire et au "squat", pratiques
inhérentes à des conditions d’existence précaires dont la loi ne se
préoccupe pas, au risque de fragiliser plus encore des populations qui le
sont déjà. Elle crée par ailleurs de nouveaux délits tels "l’usurpation
d’identité sur un réseau de communications électroniques" et aggrave un
certain nombre de sanctions pénales, imposant le principe des
"peines-plancher"...

"La sécurité, l’affaire de tous" : une privatisation de la sécurité qui
favorise l’enrôlement de tous

En outre, la LOPPSI 2 consacre la privatisation de missions de
surveillance et de gestion de l’ordre public relevant jusqu’ici du pouvoir
régalien. Ainsi, si la LOPSI 1 prévoyait déjà l’externalisation des
"gardes statiques", la LOPPSI 2 autorise l’installation de caméras filmant
la voie publique aux entreprises privées. Ce type de mesure accompagnée
d’un discours promouvant la "collaboration" et les "partenariats
public-privé" en matière de sécurité dévoile le caractère libéral de
l’idéologie qui a présidé à l’élaboration du projet de loi. Mais ne nous y
trompons pas : c’est un double mouvement d’externalisation des fonctions
de surveillance et de centralisation de l’information qu’instaure la
LOPPSI 2. Il s’agit de libéraliser la sécurité dans la mesure où cette
libéralisation favorise l’enrôlement de tous dans la gestion de l’ordre...
Comme le notent certains collectifs militants, dont le CLEJ (Collectif
Liberté Egalité Justice), la LOPPSI 2 (composée de 46 articles formant 9
chapitres) est illisible, au point que l’on peut se demander si elle ne
l’est pas à dessein, afin d’en rendre la compréhension et la critique
difficile, sauf à posséder une expertise significative en matière
juridique. Le dossier joint, que vous retrouverez bientôt, accompagné
d’autres éléments d’information et de réflexion sur le site du CECIL,
répertorie les principales mesures de la LOPPSI 2 en s’attardant
particulièrement sur celles qui concernent l’usage des TIC à des fins de
surveillance, et l’extension du fichage de la population.

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